Connection


12 janvier |

Pascal Bruckner dit "la démocratie du clic n'est qu'une démocratie d'ignares. La dextérité des jeunes est une prouesse technique, non une supériorité symbolique". Dans mon travail j'ai considérablement consommé des applications modernes et techniques, je fus en apprentissage technologique qui devait se réinventer rapidement, travail et consommation exige. J'entrais dans le moule afin de gagner ma vie et je fis ce que je croyais être le meilleur. Les médias sociaux sont apparus me laissant souvent patois, je n'arrive toujours pas à comprendre cet engouement collectif à la mode, parfois stérile et superflu sauf pour la famille ou les amis proches. De l'ère à la communication virtuelle je suis passé aux interactions virtuelles. Je ne voulais pas devenir un illettrisme électronique comme certains ailleuls, j'ai pris alors les commandes du mieux que j'ai pu pour gagner ma vie arborant une image super cool. J'obtenais d'un côté des connaissances en informatique et de l'autre je perdais une certaine dimension spirituelle, intellectuelle et humaine. Le contenant dépassais parfois le contenu comme chez les gros bras et les grosses boules d'insipides téléréalités d'occupations en vogue. Le nombre d'abonnés virtuels n'est pas un gage de succès et la quantité d'amis sur les applications n'égale pas la qualité des relations. Trois stades existent pour atteindre la liberté qui passera tôt ou tard par la révolte, la contrainte et la solitude. J'ai passé du "qui suis-je au que puis-je" pour donner un sens à ma vie. À la retraite je passe du "qu'ai-je fais et où j'en suis et que me reste t-il à faire ou à ne pas faire". Telles sont les questions maintenant qui s'imposent devant toutes actions frénétiques et superflues. Le corps ne s'agite plus autant par réflexe que par attention et réflexion libérée des taches de productivité  mécanique. "Les hommes aliénés n'avaient pas de destin jadis car ils avaient une direction commune" dit Pascal Bruckner. 

La compétition se rompt heureusement à la retraite mais ne disparaîtra pas car la loi du plus fort l'emportera toujours, telle est notre condition tribale. Le désir demeure de se confronter avec le dehors, royaume de la diversité, de la révélation et des choses qu'il me reste à explorer comme l'amour qui est une dépossession volontaire de soi en ne s'appartenant plus à part entière. Savoir reconnaître le contraste entre chaque chose apporte la lumière, me satisfaire de mon sort en restant captif aux rumeurs du monde m'interpelle; contraction et dilatation, sérénité et ivresse, absence et présence. Savoir reconnaître et accepter les dualités en allant au bout de soi-même, en s'éveillant à soi-même. 

Dans la philosophie de la longévité il est dit "que la mélancolie de ce qui passe n'est peut être rien comparée au malheur de ce qui ne passerait jamais". Le livre des morts égyptiens soutient qu'on meurt toujours deux fois, une première quand l'âme quitte le corps, la seconde quand meurt la dernière personne à se souvenir de vous. Le pire serait de n'être jamais parvenu à vivre quelque chose d'essentiel dans l'amour ou l'attachement. Les propos de Pascal Bruckner m'inspirent beaucoup. J'ai eu une discussion avec un ami sur les raisons qu'on les gens à procréer lorsqu'on connais les défis actuels de l'état du monde. La procréation est le prolongement de soi dans l'immortalité, symbole de survie, de son amour et de sa joie dans l'éternité. Je suis de la génération des baby boomers qui se distinguent par le refus du pouvoir paternel, de l'autorité et de la fin des hiérarchies. Ils ont permis une éducation libérale à leurs enfants dans l'égalité absolue des sexes et une permissivité dissonantes tranchant radicalement avec les traditions du passé. Ainsi ils ont créé une progéniture d'anxieux teintés de conservatisme. Peut-être que ce qui arrive devais arriver. L'humanité  évolue en alternance entre contraction et dilatation, entre liberté et despotisme, entre anarchie et totalitarisme. L'évolution se fait en dents de scie et nul ne peux s'avancer sur la marche du monde. Pour ma part j'espère vivre jusqu'à ma mort.


11 janvier |

Sur les côtes du Maine des milliers d'iles et d'îlots parsemés de solitude apparaissent parfois des brumes à partir du village de Stonington. Ce magnifique village de pêcheurs d'homards inconnu du touriste de masse est incontestablement le point de départ pour des explorations en kayak de mer sur la côte du Maine. Il y a très longtemps j'y ai organisé un séjour en groupe au départ du camping "Old Quarry" qui signifie vieille carrière. De cet endroit provenaient les pierres qui composaient les gratte-ciels de New York. Plusieurs connaissent le populaire "Acadia National Park" à Bar Harbor mais ce parc abrite aussi des îles méconnues et lointaines dont l'Isle-au-Haut nommée ainsi par Champlain. Notre première journée était consacrée au cyclotourisme autour de cette longue péninsule arrêtant dans de nombreux villages de pêcheurs côtiers. La plupart des bateaux s'y abritant étaient des homardiers. Le groupe était composé d'une vingtaine de joyeux aventuriers. J'ai effectué une multitude de séjours en groupe sur les côtes du Maine du Nouveau Brunswick au parc international Campobello-Roosevelt jusqu'à Portland. À proximité de Québec c'est fort agréable de séjourner dans le Maine autant à l'intérieur des terres que sur la côte surtout en essayant le plus possible d'éviter les "tourists traps". Je n'avais à ce moment aucune expérience du kayak de mer et la région représentait l'une des plus difficiles régions pour s'y exercer. Les eaux de l'Atlantique nord y sont particulièrement froides, d'où la présence de nombreux homards sans parler des brusques changements de température, des fortes marées et des brumes épaisses. En face du camping on devait traversé à l'aide d'un guide expérimenté en mer un grand chenal d'où naviguaient de nombreux bateaux qui passaient rapidement. Pour franchir le chenal nous devions lever nos pagaies très hautes pour se faire voir des navires afin d'éviter des accidents. Aussitôt le chenal traversé on découvrait des centaines d'îles désertes parfois avec des lacs profonds pour s'y baigner. Ces lacs aux eaux turquoises étaient d'anciennes carrières abandonnées. Le propriétaire du camping et d'un puissant homardier nous amena à la lointaine Isle-au-Haut pour faire de la randonnée et passer la nuit dans des "leans-to" qui sont des refuges ouverts qui signifie "s'étendre". Ils sont très populaires en Nouvelle Angleterre notamment dans le Maine. 

La Nouvelle Angleterre est le plus splendide terrain de jeu pour le plein air à proximité de Québec. Les arbres sont plus majestueux que dans la belle province et les villages plutôt authentiques. À la fin du séjour j'ai tenté en vain de trouver des compagnons pour passer quelques nuits en kayak sur les îles désertes au large de Stonington. La veille s'étant régaler de homards frais offerts par notre hôte qui accompagnaient les délicieux vins qui, à l'époque, étaient le carburant incontournable à ces weekends prolongés à vélo, en randonnée et en kayak. J'achetais des caisses de vins blancs et rouges sur lesquelles j'apposais mes propres étiquettes "Cuvée Vert l'Aventure". Ainsi plus de 75 séjours ont été admirablement effectués lors de multiples aventures au Vermont, au New Hampshire, au Maine et dans l'état de New York. Les Montagnes Vertes, les Appalaches et les Montagnes Blanches furent de loin mes plus belles aventures à proximité et, à une époque où peu de gens à Québec y séjournaient. Le club avait sa chanson thème sur l'air des Pierrafeu et j'avais toujours des délicieuses anecdotes autour du feu à faire rougir le capitaine bonhomme. Les gens étaient heureux de partager et de vivre intensément ces aventures, j'y étais pour quelque chose et cela me rendrait fier et fort. Au dernier soir à Stonington personne ne voulu m'accompagner afin d'explorer les îles austères du Maine alors j'entrepris de partir seul en me procurant une carte marine. Je n'étais même pas capable de charger seul mon bagage dans le kayak et le gouvernail est devenu défectueux après quelques heures de navigation. Les gens me prenaient en photos car ils n'étaient pas certains de me revoir vivant. J'étais décidé et rien ne m'arrêtais. J'ai navigué à travers les étoiles de mer très loin jusqu'à un îlot au large de l'archipel pour y passer la nuit. Je fis un grand feu avec tout le bois retrouvé sur le caillou perdu dans l'océan. Je bus une à deux bouteilles de vin, j'ai dansé et dormi nu en chantant. La nuit la mer s'agita et les lumières au loin que je vis la veille sur la côte avaient disparues dans la brume. La marée et la mer devenaient menaçantes et je cru que l'eau immergerait complètement mon îlot. Je ramassis ma tente dans la nuit au cimetière d'oiseaux marins qui était mon refuge sur l'îlot, mis ma jupette et m'appuyant sur une grosse roche, la corde du kayak à la main prêt à prendre le large au besoin lorsque l'îlot disparaîtrait dans les vagues tumultueuses. À la lueur de ma lampe frontale je surveillait la marée montante. L'eau a cessé de grimper sur mon caillou perdu dans l'océan juste à temps et aux premières lueurs du soleil je pris la route rapidement vers le camping sachant que cette aventure aurait pu être ma dernière. À mon retour à Québec les gens voulaient savoir si j'étais vivant afin de leur offrir une autre occasion de reprendre la route avec Vert l'Aventure.


Le cyclotourisme est apparu dans sa forme actuelle au Vermont en 1972. Un enseignant en littérature John S. Friedin au Middlebury College fut le premier à proposer, concevoir et accompagner des groupes d'étudiants à vélo dans cet état. Il publia un guide "20 bicycle tours in Vermont" qui fit fureur et plus tard il devint sénateur du Vermont et actionnaire d'United Airlines pour sa renommée d'avoir créé une agence innovante de cyclotourisme. La popularité du plein air notamment dans les "Greens Mountains" avec le premier sentier pédestre des États-Unis le "Long Trail" au Vermont fut créé en 1910. Une étude à l'époque avait démontrée que le niveau de vie de ceux qui pratiquaient le cyclotourisme était supérieur et qu'il serait positivement viable à l'économie de l'état. J'ai eu le privilège et l'honneur de travailler au Vermont Bike Touring dont John S. Friedin était le fondateur. Je fus embauché pour travailler en France et en Suisse dans le but d'accompagner des groupes de cyclistes américains à la fin des années 80. Parti des fonds de ruelles et des ghettos de Limoilou jusqu'à dormir dans les châteaux de la Loire et d'Alsace fut pour moi une escalade déterminante et un privilège inouïe pour ma future carrière. J'ai pu apprendre l'anglais, découvrir l'histoire du vieux continent et apprendre mon métier de guide durant mon séjour qui s'échelonna sur huit mois en considérant mon expérience au Club Aventure sur la Hollande à vélo. J'ai pris le soin entretemps de terminer mes études en tourisme au collège Mérici, obtenir le certificat de conseiller en voyages et d'une attestation collégiale en animation au Séminaire St Augustin. Le Club Aventure fut créé par Patrick Chaput à Montréal en 1975. Il travaillait dans la construction et organisait une fois l'an un voyage d'aventures dans plusieurs pays qui n'était pas offert à cette époque au Québec. Le premier fut le Guatemala ensuite l'Inde, le Népal et ainsi de suite. Le Club Aventure était la première véritable institution du genre au Québec d'où émergèrent les premiers voyageurs d'aventures. Je fus l'un deux et j'étais fasciné par cette entreprise tellement innovante et dynamique qui invoquait le rêve à un jeune homme comme moi rêvant d'exotisme. Le Club Aventure fut cédé à Robert Bérubé et son frère dont j'avais beaucoup d'estime et qui m'ont transmis de précieuses connaissances. Jamais je n'aurai pensé créer plus tard ma propre entreprise de voyages d'aventures. C'était bien avant internet, je rejoignais les gens par téléphone ou par la poste leur faisant parvenir les prospectus d'usage. J'ai eu de la chance, ma vie et mon destin me prédestinait à devenir un créateur, un guide et un travailleur autonome. J'ai réussi à transmettre ma passion du voyage d'aventures qui n'a cessé de croître jusqu'à la pandémie actuelle. Le monde venait de changer considérablement.


10 janvier |

"Nous ne pouvons décharger notre responsabilité sur nos gouvernements et tout attendre d'eux, comme si la santé était un droit garanti par l'état. Nous sommes les premiers responsables de notre santé et des moyens de la préserver." écrit Frédéric Lenoir. Je suis littéralement consterné par l'attitude débilitante des "antivax". Plus ignorant que ça tu meurs, sans compter ceux qui partent au soleil actuellement dans les tous-inclus. Des fois je croise des huluberlus qui croient encore, malgré toutes les informations pertinentes véhiculées, que la covid est une mauvaise grippe. Ils agissent comme s'ils étaient complètement seuls. Nous naissons avec des droits et des responsabilités me semble-t-il. Le système est une part de nous-mêmes et nous ne pouvons nous en soustraire intégralement. Avec l'âge on commence à distinguer le vrai du faux en exprimant une plus grande lucidité en général vers l'âge de 60 ans si, toutefois on se développe harmonieusement. Écouter nos aînés lorsqu'ils croissent en sagesse est d'une richesse incommensurable. Le lâcher prise à la retraite offre des privilèges et des nuances dans notre regard. On dirait que tous s'improvisent lamentablement à l'intérieur de pronostics douteux depuis la pandémie. C'est à partir de la soixantaine que je réalise l'importance de sauvegarder mes acquis, pour les jeunes ce n'est pas la priorité j'en conviens et c'est tout à fait normal. De cette constatation se développe un choc intergénérationnel. Nul autre qu'un nombre significatif d'années d'apprentissages, d'expériences doublées d'une significative éducation puissent juxtaposée un sens critique et objectif. 

Mon énergie et mon temps sont précieux avec les années accumulées et j'ai éperdument moins le goût de me perdre dans d'insignifiantes futilités. Ces "antivax" accaparent mon temps qui représente d'une certaine façon la récolte de mon labeur et mon salaire actuel c'est-à-dire ma liberté. Une minorité tienne une majorité de gens en haleine au moment ou le système failli dans l'urgentalité. En cela m'apparaît récent dans l'histoire de la démocratie que nos libertés s'effritent de plus en plus devant un dogmatisme éclaté et naissant de par le monde. Pour bien comprendre cela il faut voir plus loin que le bout de son nez en considérant que rien de nos vies redeviendront comme avant. Jamais je n'aurais cru pouvoir tenir ce discours dans ma jeunesse car mes objectifs alors étaient de prendre des risques et de me sentir ultra puissant. En vieillissant je prends conscience de mes vulnérabilités en tentant d'esquiver mes peurs dans l'ici et maintenant.

De mes nombreuses lectures parfois difficiles je suis déçu de ma fébrile mémoire mais je considère humblement mes forces et mes limites. À l'université je ne pourrais pas sélectionnés les sujets de mes études ni accorder à mon rythme l'apprentissage requis, je suis un fier autodidacte et les mentors m'ont cruellement fais défaut, j'ai su m'adapter non sans peine. Je dois toutefois avouer que j'ai tendance à me sous-estimé, il est probable que je ne réalise pas la force actuelle du subconscient qu'assimile mon esprit ou mes lectures soutenues. En ce moment je lis une bibliographie de Carl Gustav Jung qui fut un grand penseur et père de la psychologie analytique. Ce magnifique recueil écrit à la fin de sa vie comprend ses souvenirs, ses rêves et ses pensées. Ses écrits et ses recherches ne sont pas considérés faciles à même titre que de nombreux philosophes. Mon blogue et ces lectures que j'affectionne m'aident grandement à tempérer mes pensées et mes émotions tout en cumulant des apprentissages stimulants. J'éprouve la nécessité et le besoin de ne pas passer sous silence toutes ces années fugitives à me démener dans cette jungle insensée. M'affirmer avec droiture et convictions ici apporte un sens à mon quotidien et m'aide à poursuivre ma route assurément. Je suis comme le chat qui a plusieurs vies. Depuis peu je reconnais largement que mon chemin de vie m'a conduit irrévocablement vers l'extérieur dans ses limitations. Ce que je croyais passion était fuite et, en boucle, que la fuite étrangement devenait passion. Je crois avoir atteint une tardive maturité mais il n'est jamais trop tard pour se révéler. Dans la littérature je suis face à mon miroir et découvre l'étranger qui m'habite. Je cesse de m'agiter frénétiquement et je découvre de nouvelles et exaltantes études dans la réflexion. Je ressens de moins en moins le besoin de m'enivrer de rituels mouvementés en apprenant lentement la signification du mot contemplation, l'instinct et le ressenti étant fort bien maîtrisé.


6 janvier |

Je proviens de multiples fragments issus de mondes anciens, ma réalité n'a pas de frontières. En moi vivent des frasques ancestrales émergeant d'une somptueuse musique. N'étant pas celui que je croyais être, je suis plus que ma famille, que ma patrie pour reprendre Freud et la citation d'Angelus Silesius qui confirme "je ne sais pas ce que je suis, je ne suis pas ce que je sais". Sournoisement je guette ce vent frivole m'insufflant une énergie nouvelle. Je ne sais pas d'où je viens ni où je vais, mes motivations résident dans mon regard incisif et lumineux. Parfois je dérive dans un doute impitoyable diffusant quelques lumières bienveillantes. Bientôt je quitterai une fois de plus, le temps qu'il faudra, cette peur qui m'a vu naître. Je ne suis pas prophète dans mon pays car les amis que je croyais posséder étaient de piètres infidèles aux figures moribondes. Carl Gustav Jung dit "les crises ne surgissent pas par hasard. Ils nous servent d'indicateurs pour rectifier une trajectoire, explorer de nouvelles orientations, expérimenter un autre chemin de vie". Avant de sombrer dans l'oubli, j'irai marcher dans ces lieux étranges et exquis admirant des visages éclatants qui me sembleront familiers. Une tristesse m'habite pour n'avoir fait que passer dans l'indifférence de cette ville qui est mienne. J'aurai flairé des odeurs qui n'existent que dans mes souvenirs entremêlés. Une brume légère et nostalgique m'accompagne sur les sentiers reconnaissants de mon intemporel idéal. Pascal Bruckner dit "dans le quotidien écrire en tentant de tirer un récit de la platitude de nos jour me va bien. Je ne raconte pas toujours ce que j'ai vécu mais j'écris pour me comprendre et me persuader que je suis vivant".


5 janvier |

La vie n'est pas toujours un fleuve tranquille. Si vous trouvez l'aventure dangereuse, essayez la routine, elle est mortelle. Les valeurs j'en possède plusieurs, certaines plus prépondérantes. Je n'ai pas eu le privilège et la chance de développer des qualités familiales. Ma tolérance pourrait s'exprimer davantage et l'amour envers autrui parfois me fait défaut par certaines blessures ancestrales,  mais j'y travaille. Dans un article récemment, une femme dans la quarantaine affirme avoir contactée une centaine d'hommes sur internet et avoir couché avec quelques-uns d'entre eux. Elle mentionne être déçue de constater que tous ces hommes étaient immatures et qu'elle aurait aimé entendre ce qu'ils avaient à dire du fond de leur cœur. Je comprends qu'elle aurait surtout voulu entendre ce qu'elle voulait bien entendre. Heureusement que je ne suis pas le numéro 101. Internet m'apparaît telle une bulle où plusieurs miroitent leurs fantasmes dans des discussions insignifiantes et égocentrismes. On ne change pas les gens mais par l'ouverture et la compassion des miracles peuvent survenir. Les hommes proposent, les femmes disposent affirme le vieux dicton. La difficulté pour les femmes sur la toile est de faire un choix judicieux parmi les demandes reçues parfois exponentielles, selon la qualité des pixels et pour les hommes de décrocher un seul et unique rendez-vous. Je caricature légèrement et mes opinions dans ce sens ne sont pas scientifiquement prouvées, ne me jugez point car ma nature est excessive. Ces dames doivent se sentir valorisées par des centaines d'offres reçues en quelques heures pour les unes et pour les autres frustrées de n'obtenir aucunes notifications sérieuses. J'ai donné significativement dans cette faune technocrate et je ne possède ni la patience ni la conviction à ce jeu de hasard dorénavant. Regarder des milliers d'images aux descriptions redondantes et superficiels exige des heures considérables que je n'ai plus préférant utiliser mon précieux temps à des études plus épanouissantes. Où la pensée va l'énergie va ! Faut être costaud pour se faire rejeter impunément car c'est la règle de cette loterie impitoyable. Ma motivation virtuelle c'est dissoute mais le désir demeure. Au début les femmes deviennent amoureuses de la relation, les hommes en faisant l'amour. Les moyens utilisés pour être amoureux ne sont pas les mêmes pour tous mais se substituent manifestement à cette toile sournoise qui affecte les pulsions et la pensée. Cette facilité d'obtenir des désirs immédiats par le bout de son doigt deviendra obsolète et dangereuse car trop à la mode et la caractéristique de la mode est de se démodé rapidement. Jacques Ellul disait "le plus haut point de rupture envers la société technocrate et l’attitude vraiment révolutionnaire serait celle de la contemplation au lieu de l’agitation frénétique".


1er janvier 2022 |

Je suis né dans le Vieux Québec à l'Hôtel Dieu et baptisé de confession catholique à l'église St Jean Baptiste. Ma mère biologique, Gurty de son prénom et qui aurait eu 87 ans cette année, a vue sa mémoire complètement effacée par la maladie. Elle m'a "donné" à ma naissance à une grande dame dans la quarantaine qui deviendra ma mère adoptive du prénom de Marcelle qui aurait eu 108 ans cette année. Ne pouvant m'adopter légalement étant célibataire, elle décida de se marier rapidement avec un homme plus âgé, lui garantissant une sécurité financière et surtout le pouvoir de m'adopter légalement. Toute la lignée de mes descendants biologiques était juive sauf ma grand-mère qui était québécoise de souche native de la Beauce. Mon père adoptif Henri-Paul provenait de St Victor-de-Beauce et avait une formation en théologie, journalisme et agronomie. Il aurait 119 ans cette année. Rares étaient les unions entre juifs et catholiques à cette époque. Cette relation ne fut pas acceptée dans la famille du grand-père juif biologique, ce qui apporta une grande instabilité au sein de sa famille surtout lorsqu'il décédera dans la quarantaine à Montréal de tuberculose loin de sa famille. Il eu trois filles qui habitaient le quartier Notre-Dame-de-Québec. Chez les juifs la reconnaissance de l'enfant est du côté maternel et non paternel, ma grand-mère étant d'origine québécoise ne fut pas admise par le clan qui devait les projeter dans une pauvreté extrême. Les parents de mon grand-père juif provenaient d'une grande famille de commerçants juifs de Québec. Cette communauté à cette époque était très importante jusqu'à l'époque de René Lévesque qui, à ce moment, insufflait un vent d'indépendance au Québec ce qui incitaient les juifs à quitter la ville. Les valeurs juives s'identifient davantage au protestantisme qu'au catholicisme et aux valeurs marchandes anglophones. Ceci est une longue histoire que j'éviterai pour le moment. Le livre de Jacques Attali "les juifs, le monde et l'argent" pour une compréhension approfondie de leur histoire mérite une attention particulière.

Quoiqu'il en soit c'est à partir des années 70 que les juifs ont quitté massivement Québec vers Montréal et plus tard vers l'Ontario, les États-Unis et la Colombie Britannique. Mon grand-père était un Lazarovitch en provenance de la Bucovine du Sud en Roumanie précisément de la région de Iasi en Moldavie à la frontière russe. Les Lazarovitch furent les fondateurs de la première synagogue à Québec, une plaque  commémorative indique en ce lieu leur présence et leur générosité envers la communauté. Fuyant les guerres et les persécutions ils ont immigrés massivement en Amérique. Québec, Montréal et New York étaient les portes d'entrée de ces grandes vagues d'immigrants au début du XIXème siècle. Les juifs d'Europe transitaient principalement pour l'Amérique par les ports du Havre, Anvers, Amsterdam et Hambourg. Ceux qui étaient plus fortunés allaient aux États-Unis, les autres au Canada. Leurs principales occupations étaient le commerce et ils ont été les premiers à institutionnaliser le crédit à Québec, chose que les catholiques ne pouvaient faire par leurs religions. 

Mon père, un Guttman, était juif originaire de Chernivtsi en Bocovine du Nord d'Ukraine à la frontière roumaine, anciennement l'Autriche. Il aurait 114 ans cette année. Le Danube coulant sur les versants de l'Ukraine et de la Roumanie a toujours été un pôle important au commerce du développement germanique en provenance de la Méditerranée et de l'Asie. Sur  un transatlantique en provenance d'Hambourg il arriva très jeune avec sa mère, ses deux frères et sa soeur, le père Moïse arriva quelques années plus tard avec une autre soeur en transition de New York. Après une longue période de misère, il acheta un commerce de vente au détail populaire sur la rue St Joseph à St Roch. Il n'a jamais reconnu la paternité lorsque ma mère m'a mise au monde dans la honte et l'indignation qui avait 19 ans à cette époque. Elle habitait dans une minuscule chambre sur la rue St Ursule du Vieux Québec. N'étant pas désiré de mes parents, j'ai passé quelques jours à la crèche St Vincent-de-Paul à Québec qui était situé sur le chemin Ste Foy. La principale communauté juive non-orthodoxe au Québec est située à Côte St Luc de Montréal. La plupart sont bilingues mais les juifs s'identifient davantage aux communautés anglophones. Il y a une dizaine d'années à la suite du visionnement du film "Incendie" de Denis Villeneuve, je fus profondément troublé par cette histoire qui raconte le décès d'une femme à Montréal dont le père provient du Liban. Dans le film à la lecture du testament de la mère l'héritage ira aux deux enfants à condition que ceux-ci retrouvent les traces de leur père au Liban. À partir de ce moment je me suis dit que je devais réaliser mon arbre généalogique pour me rappeler de mes origines. Je connaissais très peu mon histoire n'ayant que le nom de mes parents adoptifs, de ma demi soeur Suzanne et le nom d'une des deux sœurs de ma mère biologique que je ne connaissais pas. Après de longues recherches aux archives nationales, entre autre, j'ai réussis à insérer 250 noms dans mon arbre. Ma tante Astride que j'ai rencontré plus tard quelques années avant son décès, m'a raconté des histoires ignorées sur ma mère et aussi sur la présence d'un cousin décédé à 98 ans le 1er janvier cette année à Côte St Luc du nom de Larry. Je fis la connaissance de cet attachant personnage et je fus invité plus tard à la fête Roch Hachanah à la grande synagogue Shaar Hashomayin de Westmount à Montréal. Un grand repas festif eu lieu ensuite chez un cousin et sa nombreuse famille dans leur somptueuse maison de Westmount. Je fut littéralement troublé par ce rassemblement fort chaleureux et assez déstabilisant avec ma demi soeur retrouvée à mes 25 ans. On a la même mère commune et elle fut adoptée dans une modeste famille des Cantons de l'Est.

Sur le site "my heritage" où est se retrouve mon arbre généalogique, j'ai cessé mes recherches sur 250 noms en considérant avoir constitué mon histoire, mon récit. J'ai effectué ardemment des retrouvailles et des correspondances. J'ai contacté et rencontré des dizaines de cousins biologiques de plusieurs grandes villes du Canada et des États-Unis. Mais comme on dit loin des yeux, loin du cœur, manifestement ma motivation a perdu de son intensité par la difficulté d'échanges fructueux causés par la distance. J'ai la certitude d'avoir fait ces recherches au bon moment comme si j'accomplissais le destin de me révéler et de ne pas sombrer dans l'oubli. Ma mère adoptive avait une faiblesse immense, les jeux de hasard. Toutes les nuits elle partait "jouer" me laissant seul après le décès de mon père. À mes douze ans elle devenait aveugle au terme de la loi et sombra dans la maladie et le désespoir. Mon père adoptif mourut quelques années plus tôt me sentant ainsi abandonné et mal-aimé. Ce sentiment de rejet et d'abandon m'ont accompagné toute ma vie dans une quête d'identité et de reconnaissance excessive. Ma vie tient au miracle. Je suis profondément résilient en m'identifiant, dans une certaine mesure, au peuple juif opprimé depuis la nuit des temps et à mes parents adoptifs qui malgré tout m'ont apporté un amour inconditionnel. C'est depuis quelques mois à peine que je réalise que le bonheur est plus près de ce que j'ai toujours pensé et qu'il n'est plus tributaire de quiconque. J'ai cessé d'être ce juif errant et je commence à savoir pardonner et m'accueillir avec dignité. La prochaine grande étape sera la réconciliation et l'acceptation de l'amour, étape ultime !