Promesse

Bienvenue sur mon blogue et cybercarnet personnel. Ce journal intimiste dans ses récits et propos exprime un désir de dépassement et d'authenticité.

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Polarsteps


23 mai |

Connais-toi toi-même. C'est un exercice qu'on fait tout le long de sa vie, surtout à la retraite. Il n'y a plus de temps à perdre. C'est primordial. On ne peut plus se fuir dans les distractions, le travail. On devient face à soi-même avec les choix qui s'imposent. On ne choisit pas le malheur. Ça prend beaucoup de force et de détermination pour transformer la peur en amour. Un cousin, Paul, la quarantaine. Il habite Ottawa. Il travaille dans une institution médicale. Ses parents se séparèrent jeune enfant. Comme bien des adolescents, il s'est senti isolé, rejeté. Problèmes d'adaptation, l'alcool et la drogue ont versé sur lui la souffrance. Parfois, il m'appelle pour exprimer sa détresse. Je me reconnais en lui, ayant vécu des situations similaires. La seule chose qu'il m'est possible de faire est de l'écouter et de lui dire que je le comprends. Les événements subis dans la jeunesse nous poursuivent toute notre vie. Il ne s'agit pas de fuir la douleur, mais de l'accepter. Il est dans le déni. Un jour, sa douleur sera si forte qu'il ne pourra plus se mentir. Deux solutions se présenteront, vaincre ou périr. La guérison est longue. Parfois, on n'a pas l'impression d'évoluer. Malgré les rechutes et le sentiment de faire du surplace, c'est possible. Le seul fait de m'avoir appelé est un pas en avant. Chaque petit pas compte, même s'ils sont imperceptibles. L'évolution prend du temps à se distinguer. J'ai ciré les planchers aujourd'hui. Ma copine rigole de moi. J'aime que mes affaires soient propres et à l'ordre. Il y a tellement de désordre dans ma tête que ça m'aide de faire du ménage. On pourrait appeler ça des tocs et des tics. Je suis du genre anxieux. Je l'ai toujours été. Je ne peux plus la fuir comme avant. J'essaie de faire de mon mieux en tentant de ne pas lui donner trop de pouvoir. J'ai ma date de départ en vanlife pour la Nouvelle-Angleterre. La séquence de mauvais temps s'achève heureusement. J'ai besoin de vitamine D des rayons de soleil. C'est fou le temps passé à l'intérieur dans une année. Dans les pays tropicaux, la chaleur est telle qu'on doit rester à l'intérieur aussi. Je suis très loin de toutes les dissertations philosophiques de l'hiver dernier. Heureusement, le goût d'écrire demeure présent malgré des thèmes plus légers. Je sais que je devrais méditer davantage. Ma concentration a déjà été beaucoup plus forte. C'est comme ça. Je ne dois pas tenter de me punir. Martin Gray a dit que l'action conduit à l'espoir. En prenant son corps en main, la peur s'esquive. De toujours, ce fut mon moyen le plus sûr d'y arriver. À partir de la semaine prochaine, sur la route, je serai davantage actif. Lorsque j'ai fait l'acquisition du campeur en 2020, je m'étais tracé des objectifs. Je les ai tous atteint et j'en suis fier. Maintenant, mon désir est de rapetisser moins large les régions à découvrir. J'ai fait en cinq ans un travail immense en bourlinguant d'est en ouest le continent. J'ai appris à définir mes goûts, mes limites, mon jugement. Une conclusion est nécessaire à la fin d'un texte. Conclusion.


22 mai |

Je viens de lire un article dans le journal. J'y ai noté l'essentiel à mes yeux, qui me confirme mes pensées sur la société actuelle. Ce que je vois autour de moi est l’agonie du lien émotionnel aux autres. Les quelques fils qui nous relient aux autres et nous rattachent au monde s’étiolent comme peau de chagrin. Je constate un repli sur soi pour expliquer toutes nos tares sociales. Je vois l’effritement de notre filet social, qui devient peu à peu de moins en moins universel. La privatisation grandissante de la santé, des transports en commun et de l’éducation atomise notre société. Cette privatisation dilue notre responsabilité commune envers nos concitoyens. La personne qui dort dehors pourra bien se débrouiller, tant que mes impôts sont bas. J’entends nos représentants me parler d’intérêts nationaux et d'économie, mais pas de décence. Je vois la difficulté des partis, des mouvements et des leaders qui parlent de redistribution, d’équité et de justice. Je vois ces mots devenir injures, tares, offenses. Prioriser l’empathie plutôt que l’efficacité n’est pas populaire. Mon char, mon choix a plus de résonance qu’une assurance dentaire universelle pour tous. Hannah Arendt a dit que la mort de l’empathie humaine est l’un des signes les plus précoces et les plus révélateurs d’une culture sur le point de sombrer dans la barbarie. L’empathie n’est pas le problème de cette sacro-sainte civilisation occidentale, elle sera le remède qui nous sauvera de la barbarie. Une réelle méfiance s'exerce devant les étrangers, les inconnus. L'indifférence s'est installée lentement depuis que la foi ou la charité, comme vous voulez, a cessé d'exister dans les faubourgs. D'autres temps, d'autres moeurs. Avant, les quartiers étaient des milieux de vie. Maintenant, ce sont des lieux de passage anonymes. Dans plusieurs sphères de l'activité humaine, l'uniformité, la standardisation, la perte du lien traditionnel sont la norme. Il n'y a qu'à voir les nouvelles tours d'habitation qui poussent comme des champignons partout. Je vois le monde à ma façon, malaisant, insipide. Les milieux urbains sont inodores, incolores, indifférents. Ce n'est que du spectacle. Le repli sur soi est généralisé. Tous ont la même tête. Tous branchés sur les mêmes smartphones, les mêmes bêtises. De quoi je me mêle, dirait-on ? Chaque mot exprimé est repris et interprété à la dure. Tolérance zéro. Il ne suffit même plus d'être habile. On rigole plus, monsieur. Regarder une femme dans la rue est synonyme d'agression. Lui parler, une offense. Tout ce qui n'est pas qualifié de rentable, de productif devient inutile. Les joutes verbales n'ont plus de place sauf pour les affaires courantes et pourvu qu'elles ne soient pas trop longues ou complexes. En écrivant ces lignes, je regarde ce cirque avec de plus en plus de détachement. Les clowns que nous sommes devenus font le pitre. J'ai discuté avec un homme au grand cœur aujourd'hui affairé à bricoler son motorisé. Ce fut bien. Il n'habite pas le centre-ville. Cela me prouve que l'humanité existe encore. J'en doute pas. Ceux qui nous gouvernent ne pensent qu'au pouvoir et à se faire réélire. Ils mentent et ils le savent. On appelle ça des stratégies. La politique n'est fait que de stratégies pour gagner du temps et conserver le pouvoir. Hélas, on a besoin de la politique. Les nouveaux gourous sont devenus les influenceurs. Ce sont eux, les enfants chéris de ce monde, nés avec un smartphone entre les dents. Quelle immense farce. Des acteurs de plus dans le cirque, comme s'il n'y en avait pas assez. Un influenceur, pour moi, est un opportuniste. Il n'agit que pour ses propres intérêts. J'étais un influenceur dans ma jeunesse, mais pas sur la toile. Je disposais dans les lieux publics d'une grande table d'où je déblatérais du rêve et de l'amitié. Je me rappelle de cet espace sur l'avenue Cartier pour vendre des voyages à vélo. Les cartes jonchaient la grande table avec des prospectus vantant les contrées lointaines. Je peux comprendre certains vieux d'être las de vivre dans ce monde. Le quartier où je vis n'est que physiquement beau. C'est tout ce que j'y trouve. Je ne ressens rien d'autre. Il a bien changé depuis le temps du Quartier de Lune, fameux bistro situé dans le même bled. Ça prenait des serbes pour faire danser tout ce monde d'abruptis. De grandes tables garnies de denrées gratuites étaient offertes à l'achat d'un breuvage accompagné de musiciens. Je n'ai jamais et je ne verrai jamais pareil endroit. On dansait, on riait, on discutait. C'était une oasis de fraîcheur dans une mer d'indifférence. The times are changing, chantait Bob Dylan, qui, déjà, voyait le monde se transformer amèrement. À cette époque, une pièce de deux dollars valait encore quelque chose. Je ne regrette pas le passé. Ce n'est pas mon genre. Un voisin haïtien habite à la porte d'à côté. À chaque fois qu'il m'adresse la parole, c'est pour me parler de ses joujoux, son char, son téléviseur, son vélo électrique, ses produits de consommation, etc... Il m'ennuie au point de l'éviter. Il est de ces milieux de travail où ces discussions sont la norme, sans compter les mauvaises blagues et les vantardises. Je n'ai jamais été capable de m'y faire. M'intégrer dans ces milieux m'apparaissait comme un supplice. Il en est de même pour les groupes de vélo ou de marche. Certes, j'ai aimé être leader, mais pas un participant. Aucune personne ou entreprise n'a réussi à vraiment me soumettre. Je suis un autodidacte. Le Québec est une société distincte, dit-on. Oui, le Québec ne fait pas comme tout le monde. Il aime se différencier, mais de quoi, dites-moi ? En voyage de groupe, dans les restaurants, les québécois aiment parler très fort et faire des blagues scabreuses. Combien de fois devais-je intervenir pour faire respecter les lieux qui nous accueillaient. Combien de fois devais-je intervenir pour que les esprits se calment ? Combien de fois j'ai eu l'impression d'accompagner une bande d'adolescents ou des pitres. Ils étaient en vacance, me répondirent sans vergogne, comme quoi, en payant, ils possédaient tous les droits. Ne savaient-ils pas que les droits viennent avec des devoirs ? Combien de fois j'ai eu honte à leurs côtés bien malgré moi. Possiblement que ma place n'était pas la bonne auprès d'eux. Je ne choissisais pas les clients. La logistique a toujours été mon point fort, non pas les mondalités sociales qu'engendrait mon travail. Je comprends mieux certaines choses aujourd'hui en lien avec tout ça. J'ai fait du mieux que j'ai pu. J'ai aimer mon travail, mais ne fut pas toujours à  l'aise avec les gens qui m'accompagnait. Après tout, le nom de mon entreprise portait bien son nom, Vert l'Aventure.


21 mai |

Les promoteurs et les gestionnaires font la pluie et le beau temps dans la belle province. Les politiciens et les citoyens sont à leur merci. Ils sont sanguinaires, car ils sont payés à la commission et aux primes de rendement. Ils donnent le ton aux travailleurs et aux citoyens. Leurs arguments auprès des élus sont de leur promettrent de gonfler leurs revenus. Le rendement et le profit sont leurs seuls objectifs. Ils n'ont guère de moral et d'empathie, seul comptent les résultats. Ils sont partout. Dans le roman Menaud, maitre-draveur, ils ont commencé à trahir leurs frères et vendrent le pays aux anglais. Certains s'épuisent à la tâche, ce qui n'a rien d'étonnant. Ils viennent qu'à subir les préjudices et les mêmes traitements qu'ils font aux autres. Ils mettent en place un système rigoureux basé sur la performance et qui négligent souvent la qualité des services. Ce n'est pas la qualité mais la quantité de tâches qui importe pour eux. Ils font partie d'un système où nul ne peut s'échapper. Je n'aurais pu survivre dans un tel marasme. Je ne suis pas fait pour ça. Ce système engendre beaucoup de dépressions auxquelles subissent les travailleurs. Il est facile de passer pour un paresseux dans ces entreprises. Il vient un temps où la démotivation s'accélère. La qualité des services en subit les conséquences. Heureusement que ce n'est pas partout pareil. Il n'y a qu'à traverser les ponts pour constater le changement de culture. Il est important que les valeurs humaines partagent ces tâches, sinon ces entreprises sont vouées aux échecs et aux déficits. Le mois de mai n'a pas été réjouissant pour la température. La grisaille apporte son lot de lourdeur et de fatigue. À la télé, on annonce des séries de mesures visant à sabrer dans les dépenses et les services. Pendant ce temps, des grandes entreprises engrangent des profits à la hausse. Où est l'erreur ? Où est l'arnaque ? L'alimentation continue d'afficher des hausses de tarifs et des profits à la hausse. Où est l'erreur ? À chaque jour, des résidents se font mettre dehors par leurs propriétaires. Si je tombe malade, on tentera de me faire savoir que ça ne doit pas m'arriver, car les travailleurs de la santé sont débordés à la tâche. Après tout ça, il faut bien continuer de vivre. Après tout ça, il faut continuer d'espérer que le meilleur s'en vient. Après tout ça, il y a le bonheur. La réalité dans la ville où j'habite, est différente d'une région à l'autre. Il y a beaucoup de gens fortunés et de professionnels à Québec qui déterminent sa culture, sa personnalité. Il y a beaucoup de petits bourgeois. Le Québec n'est pas un modèle enviable pour y vivre malgré les apparences et ce qu'on y raconte. Il est trop tard pour moi de changer de ville ou de région. Je dois m'adapter et fermer ma gueule. Il y a de plus en plus de gens qui doivent la fermer par les temps qui courent. Ça n'a pas toujours été ainsi. L'intolérance atteint des niveaux records à Québec. J'ai de la misère à comprendre ces faits. Lorsque je vais à la campagne, les gens me disent qu'ils deviendraient fous d'y vivre. Certains me trouvent chanceux. J'ai toujours tourné ça dans ma tête, comme quoi il soit peut-être possible qu'aucun endroit existe où je puisse être heureux. Je reviens souvent sur le sujet, comme quoi je tente d'obtenir en vain des réponses. Il faudrait faire un sondage exhaustif auprès de la population pour obtenir des réponses précises sur l'indice de bonheur sur la ville. Le monde autour de moi est tellement étrange. C'est pas pour rien que j'ai tant voyagé et que je voyage encore. Lorsque je reviens, déprimé de voir tous ces visages de plâtre, j'y vois plus clair. J'ai attrapé un rhume ou un virus. Je suis hypocondriaque. À chaque petit malaise, j'ai l'impression que je vais mourir. Il en a toujours été ainsi. J'ai de la misère à côtoyer la maladie, les gens souffrants et les misérables. Lorsque je suis angoissé, je me dis que demain ira mieux. J'ai cessé de lire, je suis moins concentré à le faire. J'ai hâte de voir apparaître la chaleur du soleil pour me chauffer l'épiderme. À chaque jour, à la télé, on raconte qu'une espèce animale est disparaît et que même les abeilles sont en danger. Le harfang des neiges, emblème national du Québec, est en forte diminution dans nos forêts, paraît-il. Faudra remplacer l'emblème par un casque d'écouteurs ou un portable. Les caribous sont moins importants que les travailleurs forestiers à qui on a donné une partie du Québec. Les caribous et les abeilles ne sont pas importants, les grandes surfaces de ce monde oui, pour que tous les faucheurs de nature puissent faire leurs emplettes et que les gestionnaires puissent mettre leur argent emprunté à la bourse.

20 mai |

Voici quelques exemples qui indiquent que les hommes régressent sur Terre. Je citerai par la suite des exemples qui nous ont fait progresser. La détérioration des ressources naturelles, les changements climatiques, la consommation excessive, l'eau potable qui viendra qu'à manquer dans certains pays, l'endettement de tous les pays, la détérioration des dépenses publiques, des infrastructures, des services publiques, les nombreuses guerres et conflits qui s'activent, la montée du populisme, de la désinformation et des régimes totalitaires, l'immigration incontrôlée, la recrudescence de la violence conjugale, des jeunes et des groupes criminalisés, l'itinérance, la consommation de drogues, les problèmes de santé mentale, la pollution, le coût de la vie, la consommation accrue d'internet particulièrement des jeunes les rendant plus vulnérables, la corruption, les conflits d'intérêts, le protectionnisme, les valeurs conservatrices excessives, la perte de confiance envers les institutions publiques, le non respect des aînés, la méfiance accrue, le désintérêt général, la perte de motivations collectives et de repères individuels, la joie et l'espoir de vivre dans un monde de plus en plus incohérent. Ce qui relève du positif de nos jours demeure la liberté d'expression, les valeurs démocratiques, la science et la technologie, les services médicaux et les programmes sociaux lorsqu'ils sont accessibles, les transports en commun, quelques idées et valeurs progressives. Je n'amène rien de nouveau mais il est bon de le mentionner. Faire le point sur la situation actuelle du monde et de sa place dans celui-ci demeure un exercice louable. Des pays comme la Russie, l'Iran, la Corée du Nord, les États Unis sous l'égide de Donald Trump, la Chine à bien des égards, l'Afganistan, Israël et j'en passe ne font pas nécessaire pour permettent aux citoyens de la Terre de progresser harmonieusement et de vivre en paix. Loin de là, ils saccagent et s'accaparent des richesses en déstabilisant et manipulant l'ordre mondial. Lorsque j'étais jeune et que l'on tentait de concevoir l'avenir, il y avait toujours de l'espoir, surtout que le monde deviendrait meilleur. On croyait qu'en contribuant en ce sens que le monde changerait. Aujourd'hui, j'ai cessé de croire aux promesses, j'ai cessé d'espérer de voir le monde devenir meilleur. La seule chose que je puisse espérer, c'est que mon regard se transforme devant chaque petite chose, chaque petit geste en me préservant de la bêtise humaine et surtout de la reconnaître. Je sais qu'il y a plein de gens de bonne volonté tout autour, je n'en doute pas. Ce sont les grandes refontes des valeurs et des visions du monde qui ne se manifestent pas comme je le voudrait. Il n'y a pas de consensus collectif et trop de divergences entre les hommes pour se transformer en profondeur et le monde qui nous abrite. Pourtant, je suis le monde. Il est possible que je sois dans l'erreur et que ce processus agisse très lentement au point de ne m'en apercevoir. Pour évoluer, chaque espèce doit faire un pas en avant et un autre en arrière. Pour progresser, ça prend des essais et des erreurs qui ne se calculent pas en termes de semaines ni de mois. Le problème, c'est que chaque homme a peu de temps à sa disposition pour apporter pour voir les gains notables de son vivant. Je n'ai pas eu d'enfants, je ne comprends pas certaines choses en lien avec la famille. Ceux qui donnent la vie à un enfant et le nourrissent considèrent, avec raison, que ce geste est suffisant pour faire évoluer le monde. Mon destin en a voulu autrement. Je n'ai pas eu ni les modèles ni le soutien nécessaire en bas âge pour y arriver. C'est avant l'âge de la puberté qu'un individu reçoit les symboles et le soutien nécessaire de ce qui adviendra de lui plus tard. Certes, il y a bien des exceptions et des nuances dans mes propos. Les miracles existent, la vie s'exprime et évolue bien souvent dans la désinvolture et la misère. Chaque individu est différent. Certains diront que c'est dans les luttes qu'on apprend à vivre. Certains diront que c'est le dur labeur qu'on apprend à cheminer. Ce que je sais, c'est que je n'en sais rien. Je suis devenu celui qui, là, en ce moment, décrit la vie au lieu de la vivre. Encore une fois, je n'en sais rien. Trop souvent, je suis fatigué à devoir comprendre et expliquer. Ne serait-ce pas plus simple de vivre tout simplement dans la paix et l'amour sans trop me poser de questions ? J'avais un professeur jadis qui enseignait l'histoire des religions et la philosophie. Il disait que les religions sont issues de pays où il est était difficile de vivre. Les gens se sont mis alors à s'inventer un monde nouveau pour éviter celui dans lequel il vivait. Je me suis toujours rappelé de ce commentaire venu de Claude, mon mentor de jeunesse. Dans les pays libres et rempli d'abondance, il n'avait pas lieu d'espérer ou d'inventer un monde meilleur. Il était là simplement tout autour. Il ne suffisait que vivre, tendre la main et s'aimer.

18 mai |

Nos existences sont la somme de nos choix, paraît-il. Comme peuple de la terre, avons-nous ce que nous méritons ? Ne savons-nous faire mieux ? La question se pose. Nous aurons beau être intelligents, bienveillants, volontaires, nous n'aurons jamais toutes les réponses à nos questions. J'ai fait mes choix par nécessité, comme plusieurs. Une ligne de vie m'était déjà tracée en venant au monde. La famille, l'environnement, les expériences m'ont façonné dès mon tout jeune âge. Je ne pouvais faire mieux. J'ai agi avec le meilleur de ma connaissance et avec les ressources dont je disposais. On peut toujours faire mieux. On peut toujours faire pire aussi. On apprend par essai et par erreur. Il n'y a pas d'autres moyens pour arriver à se connaître, si jamais on y arrive. Il y a un temps pour chaque chose. Un temps pour aimer, un temps pour agir, un temps pour se reposer, un temps pour grandir, un temps pour mourir. Les temps morts n'existent pas malgré les silences. Les temps morts le seront lorsque l'on disparaîtra. Le malheur des hommes, c'est qu'il n'y a pas de repos, de répit pour eux. L'illusion est immense au cœur des hommes. La vie est fragile. L'homme est fragile car il sait qu'il va disparaître. Parfois, je discute avec des gens, des voisins. On a très peu de choses en commun à part d'être vivants. On n'a que peu d'intérêts en commun à part de pleurer sur son sort et lire à voix haute le bulletin de nouvelles. Ne sais-je donc pas où est ma place ? Ne sais-je donc pas que mon temps est précieux ? Mon ami me dit en blaguant qu'il est intolérant aux intolérants. Suis-je devenu intolérant en vieillissant ? Ne serait-ce pas que je ne veuille perdre mon temps ? Je ne sais pas trop. Parfois, je ne sais plus rien. Je doute, sauf de la beauté. La nature est belle. Elle se régénère même quand les hommes tentent de la détruire. La nature est plus forte que les hommes malgré les apparences. Des résidents de la ville coupent les arbres pour mieux voir le fleuve. Le spectacle vaniteux est plus fort que la vie. N'est-ce pas étrange qu'on en soit rendus là ? Tout dans la vie des hommes est illusion, sauf ceux qui vivent près de la nature et qui la respectent. Les gens de la ville ne comprennent pas la nature. Ils ne vivent pas pour elle et par elle. Ils sont coupés du monde du vivant. Ils ne vivent que dans leurs têtes qui sont trop pleines de choses inutiles. Le vide existentiel les guettent. Les hommes ont perdu leurs pouvoirs car ils ne vivent pas en autarcie avec la nature. Je ne parle pas au nom de tous les hommes, mais de ceux des villes trop grandes pour contenir leurs rêves. Lorsqu'on étouffe à l'intérieur des murs, les gens s'agitent dans toutes les directions. Ils ne savent plus pourquoi ils bougent et s'étourdissent à en perdre la raison. J'en sais quelque chose pour l'avoir perdu souvent. Des fois il faut la perdre pour la retrouver. Mon ami qui est traité pour le cancer me dit qu'il ressortira plus fort une fois que l'épreuve sera passée. Des fois, je me demande ce que je vais bien écrire le soir venu. Je termine ma page sur une note positive comme j'ai dit hier. J'aime la pluie qui nourrit les fleurs et me berce de sa douceur.

17 mai |

L'idée de chaque projet de voyage me stimule. Qu'il soit au printemps, encore plus. Avant chaque voyage effectué, il en a été ainsi. Ils furent très nombreux, au point de me lasser sérieusement des aéroports, des locations d'auto, des hôtels, des restaurants. Partir en camping-car aux États-Unis est la façon la plus simple et économique pour moi de voyager. Cette façon me rends heureux. Il n'y a aucun intermédiaire. C'est la plus pure des libertés, surtout avec le vélo qui suit. J'ai un petit IPod gros comme une pièce d'un dollar. Il possède plus de deux cents cinquante pièces musicales hautement sélectionnées pour m'accompagner durant le voyage. J'ai pensé à tout. J'ai un petit radio-transistor pour le déjeuner et un autre radio pour le vélo et mes promenades. Cinq ans déjà, que mon campeur et moi accumulont des souvenirs. Sur l'application Polarsteps, tous mes tracés depuis l'acquisition du campeur en 2020 s'y retrouvent. Des textes et des clichés accompagnent chaque arrêt, chaque destination. J'ai pris ma retraite au bon moment afin de profiter de la vie. Je parcoure la route à ma guise en autonomie complète. Ça se gagne, ça se mérite, l'autonomie. Ça n'arrive pas du ciel comme ça, sauf si on provient d'une famille très riche. Je proviens de la rue. J'ai grandi et travaillé dans la rue. Ma famille était pauvre. Tôt dans la vie, je suis devenu un déraciné, un errant. Ma vie tient à un miracle. Quelques personnes de passage m'ont soutenu à leur façon. Ils se reléguaient sans se connaître au milieu du hasard. J'ai eu des anges qui m'ont soutenu. Il n'y a aucune autre signification. Les hasards et la chance existent. D'autres diront le contraire. Ma voisine s'est acheté une bicyclette. Des fourmis se sont propagées dans son logis, la pauvre. L'exterminateur est venu. Je l'appelle madame la comtesse. Les femmes sont des princesses lorsqu'elles sont jeunes. Plus tard, elles deviennent des marquises et des comtesses. J'ai un ami que j'appelait le vicomte. Il n'a pas aimé, croyant que je le traitais de bourgeois dans son luxueux condo. Je dis des mots pour l'attraction de ceux-ci. Je suis imprudent. Je l'ai toujours été jusqu'à tout récemment. De toute façon, c'est pas important. Il faut choisir ses mots lorsqu'on parle aux gens. Les mots sont souvent assujettis aux interprétations. Qui ne vaut pas une risée, ne vaut pas grand chose. Depuis peu, j'ai appris à m'abstenir de parler aux gens. Préparer la paix, c'est souvent se taire. Je n'ai pas toujours agi ainsi. Il pleut. Le tonnerre gronde. Demain, je vais au cinéma. Ma vie est bonne quand je pense à  ceux qui souffrent. Un ami a le cancer. Il a débuté ses traitements de chimiothérapie. Son moral est bon malgré son état de santé. Je sais qu'il lit le blogue. Il a beaucoup de courage. Il a toute mon admiration devant cette épreuve. Mes meilleures pensées vont pour lui. Il guérira, j'en suis assuré. Un jour, j'ai lu : si tu trouves ta vie pauvre, amène vers toi toutes les richesses dont tu as besoin. Je vais commencer à me dire des phrases positives pour qu'il m'arrive de bonnes choses. Que quelques minutes par jour ou avant de dormir devraient suffire. Que la paix, la santé, l'amour et l'harmonie m'accompagnent pour le reste de mon existence. Si j'ai à mourir demain, que je ne souffre point et que la fin soit rapide. J'ai un petit étui dans le campeur bourré de talismans pour me porter chance. Que la route soit bonne d'ici là. Je ne suis pas pressé. 

16 mai |

Je me suis beaucoup raconté dans le blogue. J'avais tellement de choses à dire qui n'avaient pas été exprimées. J'ai eu peur que ma vie allait être oubliée. J'ai eu peur de ne plus me souvenir de cette vie qui fut mienne. Je n'aime pas trop rencontrer des anciens clients, si je peux les nommer ainsi. Je ne tiens pas à revenir en arrière. Je ne suis plus le même. À quoi bon ressasser tout ce passé qui n'existe plus ? Ça me rend nostalgique de revisiter celui que j'étais dans le rôle de mes fonctions. Tout cela est devenu si loin. Ça m'a pris des années de douleurs pour me détacher de ce rôle. Tout a été si vite. L'illusion fut vive en croyant à tort avoir reconstitué une famille dans l'entreprise mise sur pied il y a déjà fort longtemps. J'ai conservé un tas de documents, d'images et de textes de cette époque glorieuse. Le club créé en 1994 a vu passer tellement de gens. Plusieurs sont déjà enterrés, d'autres ne bougent presque plus de par leurs âges ou la maladie. Déjà que j'étais le plus jeune du groupe. Ceux qui ont participé aux activités du club sont aujourd'hui devenus des vieillards. Je continue de m'entrainer, de prendre soin de moi du mieux que je peux. Je l'ai toujours fait avec quelques échappées ici et là. Un ami à moi est très positif vis-à-vis de la société. Je le suis moins, beaucoup moins que lui. Ça ne sert à rien de trop m'étendre sur le sujet avec lui. Ses lunettes sont plus roses que les miennes. Je dis de lui qu'il est by the book. Ça nous fait rigoler aujourd'hui. Ça n'a pas toujours été ainsi. Des fois, il vaut mieux s'abstenir de vouloir changer le monde. Il est trop tard. Le monde s'occupe bien de lui-même sans moi. Le maillon qui me rallie aux autres s'est disloqué. Il est devenu presque invisible. J'ai pris un bain de soleil aujourd'hui. Repos. Renaissance. Les cycles de la vie. Jamais je n'avais vu cela de façon aussi distincte. Quel rôle me reste-t-il à jouer ? J'en ai essayé plusieurs. La société aujourd'hui m'apparait si étrange, si lointaine. Ou bien c'est moi qui m'éloigne. J'ai toujours pensé qu'ailleurs pouvait être mieux. J'ai souvent pensé que demain serait meilleur. J'ai souvent rêvé d'un monde plus beau. C'est pour ça que j'aime tant aller au cinéma. Je vis de plus en plus dans un univers clos. Parfois, je me demande s'il existe pareille solitude à la mienne. La pluie est forte ce soir. La ville sommeille. Dans mon jeune temps, les automobiles étaient moins nombreuses qu'aujourd'hui sur les routes. Les gens étaient moins pressés. Ils avaient des choses à se dire, à inventer. Ils s'aimaient et c'était suffisant. Tout à coup, il fallait toujours plus, toujours plus vite, toujours mieux. Je croise un ancien directeur d'école. Il voyage sans cesse, lui et son épouse, collectionnant les destinations de luxe, les croisières. La fatigue et la vanité se lisent dans son visage. Son dos se courbe. Il est soudainement devenu vieux. Il vient un jour où les ambitions ne suffisent plus. Il vient un temps pour déposer les armes et se reposer. Rien ne sert de courir, il faut partir à point. Partir pour quelque part. J'ai souvent parti pour quelque part. Je m'en suis fait une raison de vivre. J'ai longtemps cru que j'allais à la rencontre des gens. C'est surtout des rencontres avec moi-même que je faisais. Je ne m'en rendais pas compte jusqu'au moment où j'ai cessé de chercher. Chercher l'amour, des amis, des activités, des slogans, des vérités, de l'argent, de la reconnaissance, de la fierté, de la santé. Chercher à plaire, à se distraire, à grandir, à s'informer, à s'améliorer, à s'éduquer, à convaincre, à gérer, à suggérer. Il y a beaucoup de raisons pour chercher. Il devrait y en avoir tout autant pour cesser de chercher. On ne reste pas tranquille longtemps. On veut toujours aller quelque part, vouloir devenir meilleur, obtenir de meilleures conditions. Je crois que cet été mes pauses seront plus prolongées qu'à l'habitude. Je déteste ce mot. Le mot normal aussi ne me plaît guère. Contemplatif, je le deviens pour compenser la baisse d'énergie et de motivations à m'éparpiller dans toutes les directions. Je trouve amusant de regarder les jeunes bouger sans cesse, simplement pour le plaisir de le faire. La vie les traverse et les entraîne dans la danse. Euphorie. Ivresse.

14 mai |

J'aime la beauté. L'harmonie. Je ne me rappelle pas de tous les endroits que j'ai traversés. Je ne me souviens plus de tous les visages que j'ai rencontrés. Je retourne rarement en arrière. Je prends des photos pour me souvenir. Elles sont bien classées, comme le reste d'ailleurs. Ma mémoire ne fait pas défaut. Je suis ordonné dans tout, sauf dans ma tête. C'est du moins ce que je crois. J'ai fait une longue randonnée à vélo sur la rive sud. Le Vieux-Lévis possède l'un des plus remarquable ensemble architectural du Québec. De majestueux couvents témoignent d'un important patrimoine religieux faisant face au fleuve Saint-Laurent. On entend les mouches voler tellement les lieux sont calmes et paisibles. S'y promener est un retour dans le passé. Au quai de la traverse de Lévis, il y a un parc agrémenté de jets d'eau. C'est un bel endroit, mais il y manque cruellement d'arbres. En traversant sur la rive nord, les autobus sont bondés de gens qui partent ou reviennent du travail. Aux feux de circulation, l'autobus est à mes côtés. La plupart des usagers, le dos courbé sur leurs téléphones, le spectacle est ahurissant au travers des fenêtres. La moitié des gens qui marche à pied regarde leur écran. Sur les bancs publics, même histoire. La plupart des cyclistes de plus de soixante ans ont des vélos électriques. Je suis pas rendu là. Je croise des cyclistes qui font partie d'un club pour aînés. La moyenne d'âge est très élevée. Il y a aussi des pelotons de jeunes gens roulant sur l'adrénaline à vive allure. Je n'envie pas ces groupes. La nature est en train d'exploser de chlorophylle. Je suis heureux lorsque j'enfourche mon vélo à l'extérieur de la ville. Au retour, une douche chaude, un bon repas et la satisfaction d'avoir passé une excellente journée. Il y a des gens, qui comme moi, ont refusé le destin que la société a voulu prétendre choisir. Je me suis choisi à mon gré, non pas sans misère. J'ai toujours cherché en quoi je suis unique. Je me suis forgé une utopie en cherchant à la réaliser. Modestement, j'ai décidé de me prendre en main et ne plus attendre après personne. J'ai été libre en essayant. J'ai réussi. Être libre ne signifie pas être heureux mais moins malheureux. Jacques Attali dans devenir soi est un ouvrage remarquable. Il était là dans ma bibliothèque, sans que je le remarque. Cela arrive parfois quand le temps est venu d'avancer. La vie me mets des signes sur mon passage. Il y a des événements et des voyages qui provoquent une prise de conscience. Me libérer des déterminismes qui m'asservissent est un acte vital. Les crises existentielles et les moments de grande solitude permettent de m'épanouir ou de m'affaisser. Attali dit que le besoin de l'autre est déjà une rupture à soi. J'ai dû m'arracher aux autres pour devenir mon propre créateur. Attali appelle l'événement, la pause et la renaissance des étapes importantes à distinguer. Oser affronter la solitude salvatrice est un chemin dalutaire. Il n'est pas le seul. Je crois avoir créé ma vie. Toutefois, il n'y a pas ou presque pas de repos.

13 mai |

À moins d'un changement, le beau temps arrivera définitivement vers le 29 mai. Je surveille les prévisions météorologiques en vue de mon départ imminent en Nouvelle-Angleterre. Je réalise à quel point je change en l'espace d'une année. Je le ressens dans ma tête et mon corps. Le fait de poursuivre le blogue, même si je n'ai pas trop de choses à raconter, me le prouve. Ces temps-ci, je me pose moins de questions sur la nature et le sens de la vie. Je ne fais que vivre simplement, aléatoirement en acceptant du mieux que je peux les grands silences. Il est impensable de vouloir m'articuler sans cesse tel un chimpanzé. Mon devoir pour bien vivre est d'accepter que ces silences ne viennent contrevenir aux repos du corps et de l'âme. Déjà, j'ai grandement ralenti. C'est surtout ce corps qui m'invite au repos. Je me fatigue plus rapidement qu'autrefois. Je n'y peux rien. Je dois m'adapter. Je connais des gens du même âge qui ne savent s'arrêter. Un jour, ça se refléte dans leurs visages. Tout d'un coup, ils deviennent vieux et fatigués. Écoute ton corps, comme on dit. Parfois, le mien me joue des tours à trop l'écouter. Suis-je trop ou pas assez actif ? C'est pas toujours facile de vieillir. C'est pas facile l'équilibre pour celui qui fut toujours attiré par les extrêmes. Cela demande beaucoup d'humilité et de lâcher-prise. Plus jeune, l'anxiété ne me semblait pas autant présente chez les gens qu'aujourd'hui. Que s'est-il passé pour en arriver là ? Selon moi, le monde virtuel a changé les hommes, que l'on le veuille ou non. Cela paraît facile de mettre ça sur le dos d'internet. Pensons-y bien un instant. Les jeunes gens, au plus loin de leurs mémoires, internet fut présent, clavier en permanence au bout des doigts. Venir au monde avec un téléphone à la main jusqu'à l'âge adulte et plus encore, représente un changement de paradigme important dans l'histoire des hommes. Jamais dans l'humanité, pareil modèle n'est apparu de façon aussi rapide et brutale. De quoi plombé la face du monde dans un délire technologique. C'est maintenant que d'importantes stigmatisations se présentent à nous. C'est maintenant que les problèmes de santé mentale nous sautent aux yeux. Des séquelles permanentes se sont implantées insidieusement, modifiant considérablement la culture, notre regard sur le monde et notre identité. On ne peut arrêter le progrès, comme on dit. C'est simpliste cet énoncé. Internet est tellement imbriqué dans l'économie qu'il a fait de nous des êtres serviles et dépendants. Les entreprises qui mettent au point les technologies savent comment manipuler les consommateurs et faire de nous des esclaves. Ils se servent de nos émotions pour nous étreindre davantage. Le plus insidieux, c'est que ça commence dès le plus jeune âge. Ce ne sont pas les téléphones qui sont mauvais en soi, mais l'usage que l'ont en fait. Il crée l'illusion de se rapprocher des gens alors que c'est l'inverse qui se produit, sans vouloir généralisé mes propos, car des nuances s'imposent. Nous sommes devenu nos propres bourreaux. C'est dommage pour nous. Tant pis pour nous. Le mal m'a aussi atteint, me rendant addict comme la plupart des usagers. Voilà ! J'ai exprimé dans le blogue mes préoccupations quotidiennes. Au gym aujourd'hui, tous avaient un téléphone sous la main, ne voyant même pas qu'il y avait des gens autour d'eux. Cette réalité m'est difficile à supporter. Il me reste qu'à dire ironiquement, en terme totale de soumission ; c'est ça la vie. Et puis, je passe à autre chose.

12 mai |

Des arbres matures ont été plantés à ma fenêtre. Ça me réjouit. J'ai fait quelques montages paysagers. Je me sens entouré de chlorophylle. Des oiseaux et des insectes seront visibles pour mon grand bonheur. Le bonheur parfois ne tient qu'à peu de choses. Il y a des secteurs de la ville où je n'irais pas habité. Cela fait trois décennies que j'occupe mon logis. C'est quelque chose, moi qui avait déménagé plus de vingt-cinq fois avant mes trente ans. Les deux plus grandes stabilités de ma vie furent mon entreprise qui a perduré pendant trente ans et mon appartement. Avant cela, tout n'était que feux de paille. Je croise parfois un nouveau locataire dans mon immeuble. À mes dix-huit ans, j'ai travaillé comme serveur au Dagobert sur la Grande Allée pendant quatre ans. En face, il y avait une discothèque de reggae, aussi fort populaire, l'Essentiel. À cette époque, les bars et les discothèques pleuvaient sur la ville. C'étaient les premiers groupes de funky noirs. Personne ne voyait de noirs à Québec dans ces temps-là. Le grand type de mon immeuble était le barman de la discothèque d'en face. C'était un véritable playboy doté d'un charme incroyable. Il était très grand, tout comme sa sœur plus âgée que lui que je croise parfois dans la rue. Elle aussi devait être une très jolie femme. Aujourd'hui, celui que je revois est devenu un mort vivant. Paralysé, le teint gris et cireux. Ses cheveux sont d'un gris de celui qui a vieilli trop rapidement. Il boîte, n'affichant plus la confiance de ses vingt ans. Drogue, alcool ou maladie, je ne sais guère. Plusieurs prenaient de la cocaïne, dont un collègue, Yvan, qui en a fait grand usage. Lui aussi, la maladie l'a traversé. Plusieurs visages croisés de ma jeunesse ont mal vieilli. Certains avaient de bonnes habitudes, d'autres moins. On ne sait jamais quand le sort va nous frapper. Il y en a ceux qui n'ont pas de chance. Il y a ceux qui se négligent. Il y a ceux dont la maladie leur courent après comme des abeilles. Depuis un mois, mes habitudes alimentaires sont excellentes. Je le ressens dans ma tête et mon corps. Je fait des efforts. Un autre voisin avec qui je m'adresse occasionnellement se néglige passablement aussi. Nous sommes du même âge. On est né à une semaine d'intervalle. Il provient de la Gaspésie, ça parait. Il est généreux et courtois. Je suis entré à quelques reprises chez lui. La fumée de cigarette et d'autre sources est si forte que je peine à respirer, m'étouffant sans cesse. Il n'y a plus de blanc sur les murs d'origine blanche. La crasse inonde les moindres recoins de ce hangar délabré qui se poursuit sur son chandail. Son ventre boursouflé indique une mauvaise nutrition. Il sait qu'il doit changer, le fera-t-il ? Ainsi va le monde, passant de la splendeur à la misère. Par chance que les bourgeons éclorent ces jours-ci pour mettre de l'espoir à ceux qui le méritent et me faire apparaître des paysages somptueux que la misère ne semblent pas atteindre.

9 mai |

Je me suis toujours entraîné au plus loin que je me rappelle. Je vais au gym depuis mon adolescence. Cardio, gym, yoga, sorties de raquette, randonnée pédestre, vélo. Je n'ai jamais arrêter de faire de l'exercice. Seul le ski de fond que j'ai cessé à cause d'une chirurgie au pied. Pendant plus d'une quinzaine d'années, j'ai mis sur pied une ligue de badminton et de volleyball. Je n'étais pas très bon à ce dernier. Depuis toujours, je me suis ennuyé. À trente-cinq ans, j'ai décidé de créer mon propre club d'activités sociales et sportives, de plein air et de voyages d'aventures. Durant les trente années qui suivirent, j'ai cessé de m'ennuyer. Pour aller au centre d'entraînement, je prends la rue St Gabriel. Elle est perpendiculaire à la rue Saint-Jean. J'y ai habité à trente ans. Depuis l'an dernier, la rue a été réaménagée avec bon goût avec d'autres du quartier. Elle ressemble aux rues que l'on retrouve en Europe. Certains secteurs de la ville ont grandement besoin d'amour et de vitalité. Il y a quelques espaces verts, des arbustes et des arbres sur le terrain de mon immeuble. C'est pas mal. Le quartier où j'habite fait la jalousie de plusieurs. Le coût des logements et des propriétés y sont très élevés. Peu de nouveaux arrivants y habitent pour cette raison. La plupart des résidents sont des professionnels. Les arbres y sont splendides le long des rues, apportant beaucoup de charme et d'ombrage l'été. J'ai accès à de nombreux commerces que je peux faire à pied. J'ai identifié un centre communautaire à quelques rues où j'ai peut-être l'intention de faire du bénévolat l'hiver prochain. J'ai un contact à cet effet qui pourrait possiblement m'introduire. Les contacts sont importants. Le club que j'ai fondé en 1994 a existé pendant trente ans. J'ai servi de catalyseur à des centaines de gens durant toutes ces années pour qu'ils se créent des liens. J'ai négligé de tisser pour moi-même des liens intimes et personnels. Je croyais certaines choses acquises. Ce fut une erreur de ma part. Je ne sais pas comment j'aurais pu faire de mieux. Je maintenais le club vivant. C'était à mes yeux le plus important. Ma peine fut grande, c'est peu dire, à la fin de cette aventure qui m'a littéralement maintenu vivant pendant toute ces années. La fin abrupte fut causée par la pandémie, une certaine lassitude et l'individualisme exacerbé de la société en lien avec les médias sociaux. J'ai cru que j'étais lié avec une multitude de gens au fil des années. Le choc fut brutal en apprenant qu'il n'était rien. Ce ne fut qu'une gigantesque aventure. Les gens ne firent que passer comme le vent. Il fallait bien me détacher de tout ça à la fin. Il fallait bien que je dépose le masque et le rôle que je m'étais créé inmanquablement. Je peine à me reconnaître seul, ayant côtoyé tant de gens. Les camions nettoient les rues. Les fleurs poussent. J'ai tant de souvenirs qui trainent que je n'arrive plus à les contenir. Une personne me dit l'autre jour de me considérer chanceux de m'être rendu à mon âge. J'ai fait ce que j'avais à faire avec les moyens à ma disposition. Ces trente années m'ont mis au monde. Je crois que c'est cela. Continuer à me maintenir en forme avec assiduité est mon leitmotiv. Éviter les ennuis et les contrariétés si possible est un gage de sérénité que je m'emploie à maintenir. Mon amie habitera sous peu dans son nouveau logis. Je suis heureux pour elle. Je suis heureux pour nous. C'est ce genre d'aventure qui me séduit depuis la retraite et qui m'a cruellement manqué. J'étais trop occupé ailleurs. Ma tête n'était simplement pas prête autrefois pour accueillir ce précieux cadeau du ciel.


8 mai |

Il y a beaucoup de mouvement et de tâches inutiles dans une vie. Une amie me mentionne que la moitié des employés de l'entreprise où elle travaille font des burn-out ou quelque chose qui s'y apparente. Cela ne m'étonne pas à voir les gens vivent autour de moi. Aujourd'hui, j'avais des courses sur la rive sud. De ce côté, il y a encore de l'humanité, chose que je retrouve de moins en moins de ce côté du fleuve. Les gens sont plus affables, plus lents. Ils ne négligent pas de saluer et sont manifestement moins stressés. La différence me saute aux yeux lorsque je traverse les ponts. Mes affaires sont à jour. La forme est au rendez-vous. J'ai perdu une dizaine de livres en un mois. Ça paraît sur mon énergie. Une réparation mineure mais importante a été réalisée sur le campeur. Il est prêt pour la route incessamment. Léon XIV vient d'être élu pape. C'est le premier pape américain. C'est bien pour les États-Unis qui avaient grand besoin d'un leader moral pour équilibrer les forces du mal que Trump parseme sur son chemin. Je me demande si ce choix est en lien avec l'argumentaire politique. Ma vie est d'une grande simplicité. À la radio, un animateur populaire discutait morale en lien avec la retraite hâtive. Je suis perplexe devant ces propos. On dirait que tout s'active depuis quelques temps pour nous ramener en arrière. Peut-être sommes-nous allés trop loin par en avant en négligeant certains paramètres ? Il faut frappé le mur bien souvent pour réagir devant les dangers imminents. C'est dans la chute que l'on apprend et surtout se relever. Sans cela, les hommes n'apprennent pas, dirait-on. J'ai besoin de peu pour vivre. D'amour, d'eau fraîche, de bons aliments, un abri modeste et des services de proximité. Je suis préoccupé devant les problèmes d'accessibilité de soins de santé du Québec depuis très longtemps. Pire encore, la situation se dégrade. Le système de santé est à l'image de la société, c'est-à-dire malade. En allant sur la rive sud aujourd'hui, je prends conscience de la culture que m'imprègne mon quotidien. Lorsque tout agit dans un sens, il y a peu à faire. Les résistances sont trop fortes pour y changer quoi que ce soit. De ce côté du fleuve, mes actions aussi nobles soient-elles, sont comme de minuscules gouttelettes d'eau qui s'assèchent avant de se poser quelque part. Il faudra bien un jour que de véritables réformes se manifestent avant de sombrer toujours plus profondément. Est-ce trop demander aux jeunes de déposer leurs téléphones quelques heures, comme le veulent les décideurs ? Le voyant rouge clignote pourtant depuis fort longtemps. Comment se fait-il que nous n'ayons pas encore trouvé autre chose pour nous assurer un meilleur avenir et un bonheur plus durable ? Chaque jour, je m'inquiète du sort de la ville où je suis né. Je reconnais heureusement que ce n'est pas partout pareil. Je me sens lâche de ne pas avoir réussi à quitter ces lieux. Fort probable que j'avais quelque chose à apprendre ou à gagner d'y rester. L'avenir, s'il m'en reste, me le dira.

6 mai |

J'ai eu ma première expérience de réflexologie aujourd'hui. C'était très bien, mais la dame puait de la bouche. Par chance qu'elle était à mes pieds. Je ne répéterai pas ce traitement, quoi qu'il soit efficace. C'est trop dispendieux pour mes moyens. Une balle en caoutchouc fera l'affaire en la roulant sous le pied. Bientôt, le temps des fraises. J'ai l'eau à la bouche en y pensant. En attendant, il y a celles d'autres pays. Il est rare que je sorte sans que je ne trouve rien dans la rue. Mon logis est rempli de souvenirs et de choses trouvées au hasard. C'est assez incroyable. J'ai toujours adopté la simplicité volontaire. Pas toujours par choix. J'ai quand même bien profité lorsque je travaillais. Hôtels, grands restaurants, billets d'avion, multiples destinations grandioses et et j'en passe. Mon travail de guide d'aventures m'a permis de goûter à quoi ressemble la grande vie. Je n'étais pas libre, mais je me plaisais à faire ce travail et les responsabilités qui incombaient à la tache. Aujourd'hui, j'ai le sentiment d'avoir réalisé plusieurs de mes rêves. Selon les statistiques, je vis au seuil de la pauvreté avec mes rentes. Il y a pire que moi malgré tout. Je n'envie pas les travailleurs de nos jours. La pression est énorme pour joindre les deux bouts, sans compter la charge de travail qui ne cesse d'augmenter. Je n'ai plus aucun désir de travailler à nouveau, même pas quelques heures. M'impliquer non plus, du moins pas pour l'instant. J'ai d'autres projets en tête. Le beau temps se fait attendre. Les gens vont devenir cinglés aux premières grandes chaleurs. J'habite aux premières loges pour voir le spectacle, habitant près de l'avenue Cartier. Il y a un parc de bicyclettes électriques en location tout près de ma fenêtre. Ma rue, lorsque le beau temps arrive, est un tronçon majeur de piétons. C'est encore mieux que les autos. Tard dans la nuit, les jeunes font la fête en passant à mes fenêtres. C'est à ce moment que je dois quitter la ville avec Béa, mon campeur. Il serait impensable pour moi de rester toute la semaine dans mon logis lorsque les beaux jours arrivent. Toutefois, je suis chanceux d'habiter à côté du parc des Champs-de-Bataille. S'il n'existait pas, je serais malheureux. En franchissant le seuil du parc, les odeurs d'herbes et de fleurs me sautent au nez. Tout à coup le calme s'installe. C'est mon paradis urbain. C'est le seul endroit de la ville qui me plaise avec la terrasse Dufferin pour voir des gens heureux. Ailleurs n'est que circulation automobile et voies de passage. J'exagère, je sais. Le Vieux-Québec a du charme, mais il manque cruellement d'arbres et il y a trop de monde l'été venu. Les québécois n'ont jamais eu de bonnes relations avec les arbres comparativement aux anglophones. Je recherche la beauté. Je ne la vois pas dans le trafic, sur le bitume et sur les avenues. C'est pour ça que j'ai tant voyagé. Dans deux semaines, je serai en route vers l'aventure aux États-Unis. Je partirai juste au bon moment, après la fête de la Reine. Ce long weekend, les gens ne fêtent pas la reine, mais le congé qu'il dispose. C'est la porte d'entrée de la belle saison avec la floraison, les oiseaux, le vélo et les jolies femmes. Tout d'un coup, le monde est gentil et souriant. Le contraste est frappant avec l'hiver. J'apporterai quelques livres en voyage. L'un d'eux porte sur la confiance en soi. Parfois, il m'en manque. Il paraît qu'il en est ainsi pour les poissons, mon signe astrologique. Ils ne nagent jamais en eaux calmes, ceux-là. Mon blogue qui me sert de journal m'accompagnera. Il se voudra beaucoup plus léger qu'en hiver. Une chose est certaine, c'est que l'appel de la nature est plus fort que tout. Rien ne m'empêchera de déguerpir en mai vers de plus joyeux pâturages. J'ai une date de départ mais pas celle du retour. J'ai tout mon temps.

5 mai |

La forêt et la rivière m'ont accueilli ce weekend. Dans une semaine sera la période où les oiseaux seront les plus nombreux dans les arbres. Dans une semaine, le vert tendre du feuillage renaîtra en même temps que nous. Le goût de lire a passé. Pas celui d'écrire. Que c'est étrange. Je me surprends à ouvrir le téléviseur en soirée. Je le croyais absent de mes désirs. J'alterne mes habitudes comme au gym avec les exercices. Sinon, je cesse de progresser. Cela vient avec le changement de saison. Je suis en train de muer vers quelque chose que j'ignore. Jamais je ne le saurai. À chaque instant, je me transforme. Une année dans la vie d'un homme est si peu et à la fois si grande. Une année dans la vie d'un homme n'est rien en lien avec l'univers. Une année dans la vie d'un homme c'est immense. Le temps passe. Tout passe dans la vie des hommes. Je ne dois pas trop y penser. Ça me donne le vertige. En écrivant, j'écoute de la musique baroque que j'adore. Il y a aussi les chants religieux. C'est apaisant. Cette musique me nourrit. Elle me fait traverser les siècles. J'ai une amie qui est belle et que j'aime. Nous nous complétons. Nos énergies rayonnent en simultané. Nous marchons dans la même direction. Ça sécurise de traverser la vie avec un être cher. Je suis optimiste avec mon amie. Nos conversations sont profonds et sincères. On rit beaucoup ensemble. Mon blogue a changé d'allure depuis peu. Moi aussi. Un voisin, Karl, me demande à chaque jour, le croisant assis sur le balcon de l'immeuble quel jour nous sommes. Sa santé se dégrade rapidement. Il se néglige. Il ne le sait pas. Une crasse immonde l'habite. C'est triste de le voir échouer de plus en plus à chaque jour, brûlant cigarettes après cigarettes dans sa déchéance. Il n'est pas le seul. On n'y peut rien. Nous n'avons ni la force ni la volonté de changer le monde et sa misère. À  peine pouvons-nous se transformer. Notre existence exige des efforts de notre part au quotidien pour continuer d'avancer sereinement en bonne santé physique et mentale. C'est le travail de toute une vie. Manquer de vigilance et notre vie qui ne tient qu'à un fil se termine rapidement. Plusieurs baisse les bras au parcours. Il y a des choses qui nous sont impossible de faire pour changer le parcours. Il y a aussi des choses qu'ils nous est possible de faire pour améliorer notre sort. Ce qui est difficile, c'est de faire la différence entre les deux. Ce n'est pas en accumulant richesse et savoir que je serai plus heureux.  On ne peut être jamais satisfait de notre sort. C'est ainsi que les hommes vivent. Ils cherchent toujours à s'améliorer par différents moyens. Les hommes sont en mouvement perpétuel. Rien ne changera. Cela peut paraître insensé. L'homme est un animal insensé. Ça ne sert à rien de vouloir le transformer. Il le fera lui-même par ses expériences. Il ne lui suffit qu'un modeste terreau pour exister et se répandre. La musique m'inspire. Le soleil réjouit mon cœur. Demain est un autre jour. Quelle sera la prochaine surprise ? Qu'apprendrai-je de nouveau demain ? Le seul fait d'être vivant et la possibilité de m'émerveiller du grain de sable et du temps qui fait devrait me suffire.

2 mai |

Peace and love. On en a besoin. Il est bien loin le temps où l'on parlait d'amour et de paix. Lorsque j'allais en Italie, je me demandais comment était-ce possible que tout ne s'écroule pas dans le pays. Il y a une forme d'anarchie et de chaos qui règne, sans parler des bâtiments qui risquent de tomber à chaque coin de rue. Il en est ainsi dans plusieurs pays. Le Québec n'y échappe pas. La province se trame de rapiécage. Un manque d'amour se reflète ici et là. Tous les services publics n'y échappent pas, surtout le système de santé et les programmes sociaux. Ceux qui ont déjà conduient chez nos voisins du sud comprendront ce que je veux dire. La gestion publique n'est pas efficace. La gestion du Québec inc. n'est pas saine. Ce n'est pas la faute de personne. C'est la faute à tous. La volonté collective n'y est plus. Sans l'apport de tous les immigrants, le Québec serait cruellement en pénurie de main d'oeuvre. Sans l'apport des immigrants, il y aurait plus de logements et moins d'encombrement dans les services sociaux. Le monde parfait n'existe pas. La belle province est repliée sur elle-même, dans sa culture, dans sa façon de vivre. Il ne s'agit pas seulement de besogner. Il s'agit d'amour en partage, de valeurs à répandre, de la joie d'être ensemble. Les gestionnaires et trop de gens travaillent en vase clos. Une protection accrue de certaines classes de gens créée des clivages. Qui suis-je pour critiquer de la sorte  ? Pourtant j'ai déjà mis la main à la pâte. J'ai contribuer que maintenant j'aimerais profiter de la retraite. Je ne désire pas m'impliquer. Le goût n'y est pas. J'ai déjà beaucoup donné. Le compagnon russophone au gym me dit qu'il quittera le Québec pour aller vivre en Europe de l'Est. Il ne retrouve pas ici les valeurs et les rêves qui l'habitent. Il a beaucoup voyagé. Il sait de quoi il parle. Je l'appelle l'espion. Ça le fait rire. Nous sommes d'accord sur différents points de vue arborant la ville et sa culture. Une Dominicaine vient me parler. Elle quitte le gym cette semaine. Elle possède le visage le plus rayonnant et souriant du centre. C'est une personne profondément humaine. Elle dit qu'ici dans le centre qu'il n'y a pas d'amour, d'amitié et de joie. Je pense exactement la même chose. Elle cueille les fraises à l'été en chantant. Les gens s'entraînent, ignorant tous ceux qui les entourent. Leurs téléphones sont accrochés à eux comme faisant partie intégrante de leur physionomie. Les autres n'existent qu'à travers leurs écrans. On va bannir les téléphones cet automne dans les écoles. Il me semble qu'il est trop tard. Le mal est déjà fait. Le spectacle est triste à voir au-delà des beaux bodies et des vêtements à la mode. C'est pathétique. Je n'avais pas préparé outre mesure ma retraite à part du campeur. C'est quand même quelque chose de se lever le matin en pleine nature ou dans une joyeuse campagne. Chaque soir, un lieu différent. Rien de mieux pour contrer la routine et le même décor de son logis. Lorsque les finances font défaut, les options sont limitées. Je survis avec le minimum. Je reconnais quand même avoir de la chance, mais ma joie n'est pas à son comble. Je ne ressens pas les vibrations nécessaires à l'élévation de mon âme dans cet univers burlesque. J'ai toujours l'impression de devoir me battre pour faire ma place et récolter un peu d'amour. En attendant je ne sais quoi, j'écris pour faire le point et passer le temps. J'ai hâte au beau temps pour traverser la frontière en campeur à la recherche d'humains à qui échanger.

1er mai |

Un hodophile est quelqu'un qui aime le voyage et l'aventure. Je crois l'avoir toujours été. Sans cela, la vie m'apparaîtrait triste et monotone. Par chance que le cinéma existe. Parfois, j'y vais lorsqu'il fait beau. J'ai tout mon temps d'être dehors au soleil. Je remarque que les gens achètent plein de trucs lorsqu'ils sont déprimés. Il y a beaucoup de gens déprimés dans les centres commerciaux. Ça ne paraît pas comme ça. Ceux qui y travaillent le sont aussi. Pas tous. Certains savent qu'ils ne travailleront que sur une courte période. Un voisin sortira de l'hôpital. Son estomac a éclaté par la boisson. Son ami lui demande s'il a encore soif. Il lui dit de se mêler de ses affaires. Je ne lui parle pas. C'est mieux ainsi. Dans mon immeuble, il y a beaucoup de pauvres gens. Les logements abordables les abritent. La plupart vivent seuls. J'ai une voisine que j'aime bien. On mange un plat d'olives à l'occasion. Elle a toujours un large sourire. La vie est pas toujours facile. Parfois, je me demande à quoi ça sert de vivre. Il y en a qui ont des raisons de vivre. Moi, j'en trouve pas beaucoup. Il y a les fois où je réussis à bien méditer. Il y a des moments où je sens la terre fraîche au soleil ou sous la pluie. Il y a les balades à vélo. Les lilas. La musique sur la route. Il y a le sourire d'une amie dont je ne sais pas si elle sera toujours là. C'est pour ça qu'on prend des photos. C'est pour se rappeler d'eux lorsqu'ils nous quittent. La vie est difficile car on sait qu'on va partir. Ce n'est pas autant de mourir qui m'ennuie que de souffrir. Je devrais être joyeux avant mon départ. Mon cœur dérive. Des fois, il y a des solutions. Des fois moins. Il m'arrive souvent de ne pas en avoir du tout. Dans ces moments, j'attends. J'essaie d'écrire. C'est pour ça qu'on fait des projets. Rester seul longtemps avec soi-même est déroutant à la longue. D'autres s'en accommodent. En vieillissant, on ne peut plus se fuir. La moindre négligence se paie très cher. En vieillissant, on ne peut tricher. Être soi, avec soi en permanence, est exigeant. C'est pour ça que la fuite existe. C'est pour ça que j'aime dormir. C'est pour arrêter de me demander ce que j'ai à faire de tout mon temps. Ça n'a pas toujours été ainsi. Ça doit être comme ça quand on vieillit seul, j'imagine. Je rencontre une vieille connaissance, Robert qui a mon âge. C'est un dandy. Il a hérité d'une fortune. Il dit aimer les gens. Il me raconte des histoires sur sa copine. Il dit être intolérant en vieillissant. Ça lui arrive aussi avec elle. Je croise beaucoup de passants où j'habite. Plus il y a de gens qui m'entourent, plus je me sens seul. Ça m'inquiète. Une chance que mon campeur est présent pour me rappeler qu'il existe des ailleurs. Que ferais-je sans cette possibilité de m'évader loin de la foule  ? Je discute avec des nouveaux arrivants. Ils me racontent des choses sur la culture ambiante de la ville. Il y a un rapprochement entre quelques-uns d'entre-eux et moi-même dans mon sentiment de me sentir étranger dans ma propre ville. Je ne l'ai pas choisi, je la subi. Par chance qu'il y a les matins, les petits déjeuners, l'espoir d'une nouvelle journée, les rencontres fortuites.


29 avril |

Je regarde le lac comme si c'était la première fois. Des canards s'amusent. Le soleil est chaud au lac des Sources. Dans la journée, j'ai fait ma première randonnée à vélo de la saison. Je suis dans Lotbinière, le plat pays. Le vent est fort. Les chevaux mangent l'herbe dans les enclos. Mon odomètre affiche soixante kilomètres au retour. On m'avertit de déguerpir avec la van, sur le terrain près de l'eau. Pourtant aucune affiche me défend d'y stationner. Il y a quelques beaux petits lacs. Malgré la proximité de la ville, ça sent bon la campagne. Les boisés sont généreux. Les oiseaux chantent le printemps. Je me stationne plus loin sur le bord du lac, les roues à moitié dans la rue. Je m'endors paisiblement après le coucher de soleil. Je vais bien. Je n'ai eu aucuns voyages ou weekends de ressourcement cet hiver à part quelques trop rares sorties de raquettes. Cette escapade arrive à point après une semaine tumultueuse remplie d'émotions. L'habitacle du campeur est petit. Je dois m'y faire. C'est le seul que je possède. Je pense à tous ceux qui n'ont pas cette chance d'en avoir un et qui croupissent l'été en ville. La nuit est froide. Je suis agité. Cette légère fugue n'est que le prélude de plusieurs excursions à vélo. J'ai perdu du poids depuis un mois. J'ai encore dix livres à perdre. À la fin mai, je vais rouler dans les Berkshires au Massachusetts et dans les Catskills de l'état de New York. Mon programme est déjà établi. J'y suis déjà allé. Cette fois, je vais approfondir quelques secteurs soigneusement sélectionnés. La canopée est plus abondante qu'ici. Nos arbres sont petits comparativement à nos voisins du sud et de plus, ils les chérissent. La ville est venue planter deux beaux arbres sous ma fenêtre. Un projet d'embellissement paysager verra peut-être le jour sur le terrain de mon immeuble. Le mois de mai est le plus beau de l'année. Un ami me dit de monter au balcon lorsque j'ai des émotions. J'arrive à comprendre ce qu'il dit. Les marches sont hautes. Il paraît que si on fait une mauvaise action, l'univers entier nous le fera payer. Si je fais une bonne action, l'univers me le rendra au centuple. Je commence à y croire. Je n'ai qu'une petite envie d'écrire. Je fais un effort. Sinon, que devrais-je faire ? J'ai bien compris que je devais faire des pauses de tout ce charabia. Il se sert à  rien de courir surtout à mon âge. De toute façon, personne ne me lit, preuve à  l'appui. Et puis à quoi ça sert ? De toute façon, ça m'intéresse personne. Les gens aussi ont leurs histoires. J'aime la campagne pour les liens étroits que les gens tissent entre eux. La campagne est moins tranquille qu'elle n'en a l'air avec tous les réseaux d'amis et la parenté. Dans une autre vie, je n'habitais pas en ville. Surtout pas les grandes. Je n'aime pas les grandes choses que les hommes construisent. J'aime la nature apprivoisée, les petites villes belles et tranquilles ou presque rien ne semblent se passer. En ville, je rêve et j'ai toujours rêvé de vivre loin de la foule. Juste la présence des gens que j'apprécie et que j'aime me suffirait. L'été j'irais pêcher avec des amis, l'hiver, je referais le monde devant le foyer loin du vacarme et des gens pressés. Au lieu de changer d'adresse, j'ai traversé les paysages. C'est mieux que rien. Je ne connu personne habitant la campagne. Même si j'en connaissais, on n'aurait pas grand-chose à se dire tellement nos vies sont différentes et que les distances nous séparent. En vieillissant, je parle moins aux passants. Ce n'est pas que je n'aille rien à dire. C'est plutôt les occasions qui manquent. Ça y est, j'ai réussi un petit chapitre. Il faudra bien que je me pratique un peu avant mon départ. Voyageant seul, je dois bien écrire, si je ne veux pas perdre la carte, comme on dit. Je trouverai quelques livres sur la confiance en soi pour le voyage car elle s'effrite parfois sans m'avertir. Écrire me permet de prendre ma température. Si l'envie n'y est pas, c'est que ça ne va pas ou bien que je suis trop fatigué pour le faire. C'est étonnant de voir comment je change en si peu de temps. C'est étonnant comme tout change autour de moi.