Parabolique

Bienvenue sur mon blogue personnel. Ce journal intimiste exprime un désir de dépassement et d'authenticité.

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Polarsteps



14 juillet |

Il fait chaud, trop chaud. Je suis allé me baigner avec une amie dans une cascade d'eau pure et fraîche dans les montagnes. Quelques kilomètres de marche suffisent pour atteindre la rivière Sault-à-la-Puce de Château Richer. L'endroit, une pure merveille est peu accessible. Il n'y a que ça à faire pour moi lors des canicules qui perdurent. Les actualités m'épuisent. J'évite. Le climatiseur fonctionne à fond de train. Juillet et le début d'août ne sont pas les moments de l'année où mon biorythme est à son meilleur. Il en a toujours été ainsi. Je ne reçois plus de courrier ou très rarement. Les téléphones se font rares. Si ce n'étaient que quelques amis, je serais presque absent, oublié, inexistant du monde. J'ai projet de faire du bénévolat cet automne, si l'occasion se présente. L'embellissement de la ville par les espaces verts est le champ d'intérêt dans lequel j'aimerais m'impliquer. Protéger l'environnement par des actions concrètes me tient à cœur. Un autre sujet qui m'interpelle est la mise en place de moyens pour rompre l'isolement. Innover en ce sens, interagir, intervenir. Le monde actuel n'est plus celui d'hier et ne sera pas celui de demain. Trop m'activer ne me sert plus à rien, sauf en voyage où mes sens deviennent hyperéveillés. J'y reviens toujours épuisé. Mon enthousiasme, lorsqu'il se manifeste, soutenu, m'épuise. Je suis un être étrange, je l'ai toujours été. Toutefois, étrange est bien relatif. En ce sens, le monde est étrange. Ce sentiment à fait de moi un être qui se crée constamment. J'ai toujours possédé des cartes routières, topographiques, des guides de voyages. Je ne peux pas me passer d'eux. Je les ai toujours consultés, au plus loin que je me souvienne. Sans eux, je serais dans les eaux dormantes, somnolent, indifférent. Les projets nous tiennent en alerte, éveillé, émerveillé. Chaque nouveau projet ou départ est une promesse que le meilleur est à venir. La retraite est à la fois belle et ingrate. Belle, car on devient libre, si la santé le permet. Ingrate, car une partie de ce que nous avons été, tombe dans l'oubli. Nous ne sommes plus les travailleurs actifs de jadis, les réformateurs ou décideurs. Nous ne sommes plus les acteurs des grands projets économiques. Malgré tout, la vie continue avec ou sans nous. Nous qui croyons être irremplaçable, la réalité est difficile à accepter. Ne demeurent que les liens qui nous unissent et qui, sans eux, font que le bonheur ne serait pas le même. Le bonheur n'existe que lorsqu'il est partagé. Malgré la fatigue, la lassitude, mon devoir est de continuer, toujours et toujours d'avancer et de créer. Il y a peu de répit même pour les hommes libres.


12 juillet |

Il y a beaucoup de gens qui passent sous mes fenêtres. Je suis retourné au gym aujourd'hui après six semaines d'absence. Martin est l'une des personnes avec qui je cause à cet endroit. Les autres sont trop affairés à lever les haltères ou à regarder leurs téléphones. Martin a pris sa retraite à 55 ans. Son écoute est exemplaire. Il occupait un poste important aux finances à Ottawa. Sa carrière, il l'a passée assise. Durant ses vacances, il a fait de nombreux voyages d'aventure à  travers le monde avec des agences spécialisées. On a des choses en commun, de plus il est sans enfants, tout comme moi. Les québécois aiment se plaindre et critiquer, me dit-il en ayant vécu au Québec et en Ontario. Peut-être cela lui a revenu en m'écoutant. Aucune fois dans mon voyage aux États-Unis, je n'ai constaté cette caractéristique qui nous est propre. Je ne fais pas bande à part malheureusement. Les anglophones sont atrocement positifs. À leur contact, cela m'influence. C'est l'une de ces raisons  qui me donne le goût d'y retourner. Éric, un entrepreneur bouquinier de mon quartier, aime parler aux passants. J'ai beaucoup de respect pour les entrepreneurs, d'autant qu'ils ne tentent pas de profiter des clients. Mutuellement on se fait des éloges. Cela me surprend. On discute quelques temps sans qu'il veuille me vendre quoi que ce soit. Au contact des gens et des livres, il s'enrichit considérablement. Il me demande ce que l'on pourrait faire pour changer la culture ambiante, trop indifférente à mon goût. Je suggère de saluer les gens, de sourire. Je viens de lire un article sur l'implantation de bancs publics dédiés aux conversations entre inconnus. L'idée ne provient pas d'ici. Ce projet nait d'un besoin criant. La culture d'une société n'est pas l'addition d'activités et de tâches à effectuer. Ce n'est pas leurs sommes qui compte, mais leur qualité. Le plus grand bien que l'on puisse avoir se retrouve dans les liens qui nous unissent les uns aux autres. Peut-être il y a-t-il trop de gens qui passent à mes fenêtres. On effectue régulièrement des sondages sur le bonheur en lien avec les lieux que nous habitons. Les petites municipalités gagnent la palme. Ça ne m'étonne pas à voir tous les passants anonymes qui passent à ma fenêtre. Lorsque les gens critiquent, c'est qu'en partie, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Il y a aussi ceux qui gagnent leur vie en chialant. Il y a ceux qui ont besoin d'attirer l'attention sur eux-mêmes. Martin et moi aurons certainement beaucoup d'autres choses à nous raconter. Nous aurons réussi, dans quelques échanges, à briser l'indifférence de ceux qui fréquentent les lieux. Les visages seraient beaucoup plus sereins si les gens avaient des choses à se raconter au lieu de voir défiler les actualités sur leurs téléphones. Le spectacle est triste à voir, me disait une Dominicaine au large sourire, le printemps dernier. Elle n'a pas renouvelé son abonnement, ne ressentant pas la joie et le désir de partage à l'intérieur de ce centre de santé physique. Le festival d'été tire à sa fin. Le mien aura été celui du repos et de Netflix.


6 juillet |

J'ai l'impression de revenir de très loin. Je fus vraiment impressionné de m'être projeté au temps de la glorieuse époque de la villégiature juive des Catskills. Hier soir, j'ai visionné de nombreuses vidéos, me replongeant dans un monde qui n'existe plus. De 1920 à 1970, les hôtels de Borscht Belt dans l'état de New York ont accueilli des millions de juifs en vacances. C'était en même temps que la Floride prenait en hiver son envolée touristique. Dans les années 70, avec l'arrivée des charters, des complexes touristiques et des destinations en vogue dans le monde, des croisières à rabais, les touristes de New York ont délaissé les Catskills et les grands hôtels qui ont marqués l'histoire. Tous ces villages où abritaient ces hôtels en réalité, étaient de grandes et joyeuses communautés qui ont transcendé le XXème siècle. Les hôtels firent faillite et tombèrent en ruines. J'ai retracé cette étonnante histoire, investiguant sur place les dernières pierres et des témoignages. Hélas, il ne reste que des débris et quelques hôtels en ruines qui servent de camps d'été aux juifs orthodoxes. Cette communauté est forte bien organisée. J'ai le vague à l'âme au retour. À titre de statistiques, depuis juillet 2020, j'ai parcouru avec Béa, mon campeur 64,150 kilomètres sur 517 jours investiguant des régions inédites qui m'ont toujours tenues à cœur. Malgré la nostalgie, j'ai réalisé des rêves qui m'ont toujours porté. Le confort n'était pas toujours au rendez-vous, mais les images fortes resteront. Au retour, je romps avec une voisine avec qui j'ai des différends. Ce n'est pas la première fois. Maintenant ce sera la dernière. C'est pas facile de bien vieillir pour plusieurs raisons. La solitude, l'isolement pour certains, les problèmes de santé, la perte de stimulation et d'intérêts devant des choses qui auparavant nous faisaient frémir, les regrets, la culpabilité. Les retours de voyage sont pénibles, mais ils me permettent de mieux voir ce que je quitte. Ils me permettent au retour de faire des choix plus éclairés pour la suite. Il est préférable de laisser couler le bois mort dans le courant de la rivière. S'y attarder avec vigueur m'entraîne dans un gouffre qui ne m'est pas destiné. Il faut mieux poindre mon regard vers d'autres horizons avec dignité et respect pour soi-même que de se morfondre dans un puit sans fond. Je n'aime pas me justifier devant chaque chose, chaque mot, chaque événement. La vie passe rapidement, cela ne vaut pas la peine de s'attarder à des pacotilles. Ma copine et moi avons fait la crémaillère dans son nouveau et lumineux logement. C'est une femme rayonnante et admirable qui sait me tirer vers le haut et voir le meilleur en moi. J'ai tourné une page sur mon passé, malgré le fait qu'il m'habite encore sans que je puisse l'empêcher de se manifester. En vieillissant, le regard que je porte sur le monde se transforme. Le regard des autres à mon attention, s'il y a lieu, se transforment aussi. Au retour de ce voyage intense et profondément enrichissant, je me questionne sur mes motivations et projets futurs. Je compte repeindre mon appartement avec des couleurs plus claires, plus apaisantes. Wabi-Sabi est le terme associé à cette mouvance venue du Japon. C'est une raison de m'adapter et renaître dans de nouvelles vibrations plus près de ma personnalité. C'est une raison pour rompre avec celui que j'ai été dans un nouveau départ. Je dors beaucoup depuis une semaine. Je dois accepter que le monde sous mes pieds soit bien tranquille. Je n'aime pas lorsque ma vie est trop tranquille. C'est un passage obligé pour renaître en quelque sorte. Ma copine et moi nous nous ressemblons à bien des égards. Elle est mon alter ego, un ange dont j'ai l'impression qu'elle veille sur moi. La chaleur est accablante dans mon logis. Les paysages ont cessé de défiler. L'excitation et l'enthousiasme du voyage de la vie nomade laissent place à la somnolence, à la lourdeur de la routine et du quotidien. Il me restera des souvenirs pour me raconter que j'ai vécu intensément cette saison qui ne reviendra plus. La nostalgie me guette assurément. À ce moment, j'irai me mettre la tête dans l'eau froide et attendrai sagement que la douleur passe.

2 juillet | 

J'ai toujours trouvé les retours de voyage pénibles. Les derniers jours de voyage, j'ai cessé de faire mon budget, je mange au restaurant, envoie mon argent en l'air et cesser de me discipliner. C'est comme si je compensais pour un manque, comme si je perdais le contrôle de moi-même, si je puis dire. Ou bien c'est l'énergie qui n'est plus au rendez-vous. Je deviens alors anxieux et fatigué. Pour compenser, je fais des trucs étranges, comme m'envoyer une alimentation trop riche dans le ventre. Quatre semaines en solitaire, c'est légèrement trop, surtout si, comme j'ai fait, je passe quelques jours à New York sous la canicule. Je n'aime pas les grandes chaleurs humides. Je n'aime pas le soleil de juillet et du début août. La lumière est âpre, pas assez subtile. Au retour, je ne retrouve, jamais celui que j'ai été. Toutefois revenir dans les mêmes lieux m'oblige à répéter les mêmes gestes, la même rengaine. La routine revient rapidement après les courses et les mises à jour d'après-voyage. La vie coûte extrêmement chère. Les prix n'arrêtent jamais de grimper. Les salaires ne suivent pas les dépenses relatives au coût de la vie et je parle pas des pensions de vieux. On aime tous être en contrôle de nos vies. Les imprévus sont inévitables. Cela ne fait que vingt-quatre heures que je suis de retour et déjà écrire me manque. Sans ce moyen d'expression, je rate quelque chose. L'absence de mots provoque en moi un vide douloureux. Écrire me permet de faire le point de cette journée qui ne reviendra plus et qui, sans que je la note dans mon journal, ne serait pas la même. Écrire ma journée permet de ne pas l'oublier ou qu'elle tombe dans l'indifférence la plus totale. Continuer d'écrire me permet d'éviter de rompre mon rythme, de ne pas revenir en arrière, de ne plus retrouver celui que j'ai laissé. Écrire me permet d'élargir mes horizons en abattant les cloisons de mon logis. De telles expériences que je viens de vivre pendant un mois laissent des séquelles profondes. Elles sont positives malgré la fatigue qui stagne. Le monde est rempli de représentations et d'illusions. Ce qu'il reste au retour, ce sont les repères et les quelques amis que l'on retrouve. La vie n'est que mouvement. Comment ferais-je pour être immobile sans rien écrire et penser ? Je suis du genre à toujours me poser des questions existentielles. Je suis toujours du genre à m'interroger sur le sens de ma vie et sur celui des hommes en général. Les prochaines semaines deviendront un devoir pour moi de me reposer et de réfléchir sur les raisons qui me poussent à vivre ainsi. Plus j'avance en âge et plus il m'est difficile de me projeter dans l'avenir. Je n'aime pas les tâches en suspens. Je suis proactif, du genre anxieux. Je n'y peux rien. C'est mon corps qui m'oblige à freiner, sinon je traverserai sans cesse le mur du son. J'ai toujours aimé explorer, voir le monde, comme on dit. Curieux de nature, il m'est difficile de rester immobile trop longtemps. J'ai l'impression de procrastiner, de perdre mon temps. Avec le temps, je comprends que les pauses sont nécessaires. C'est à ce moment que mon journal prend toute son importance. Rn écrivant je ne suis pas immobile.